<38>avaient été faites à Vienne, et que, quoique le prince Kaunitz eût évité jusqu'alors de s'expliquer sur ce sujet, on pouvait néanmoins prévoir qu'il y donnerait volontiers les mains, aussitôt que les deux autres puissances seraient convenues de leurs intérêts réciproques; il se servit de ce motif pour que cette affaire fût conclue plus promptement, parce qu'il n'y avait pas un moment à perdre.

Peut-être que la lenteur et la paresse habituelle des Russes aurait encore traîné la conclusion du traité en longueur, si la cour de Vienne n'eût servi le Roi sans le vouloir. Tous les jours elle faisait naître par sa médiation de nouvelles difficultés pour la paix; souvent elle chicanait avec aigreur les Russes sur leurs énormes prétentions, et s'expliquait d'un ton despotique sur les articles de la paix qu'elle rejetait, favorisant les Turcs en tout ce qui dépendait d'elle. Mais les mouvements qui se faisaient dans l'armée de Hongrie, achevèrent de rendre les Autrichiens suspects à la cour de Pétersbourg. Dans ce même temps, une rumeur se répandit dans le public que les Impériaux négociaient un traité de subsides à Constantinople; cette dernière nouvelle donna l'alarme au conseil de Pétersbourg, et le Roi, qui communiquait aux Russes tous les avis propres à découvrir les intrigues des Autrichiens, parvint enfin à tirer la cour de Pétersbourg de cette léthargie dans laquelle elle était plongée. L'impératrice de Russie sentit le besoin qu'elle avait d'être assistée par Sa Majesté : elle jugea que pour s'assurer de ce prince, il fallait lui procurer des avantages, de sorte que le comte Panin déclara au comte Solms qu'il n'attendait que le projet de partage de Berlin pour entrer avec lui en conférence sur ce sujet.

Ce projet s'expédia bien vite à Pétersbourg; il donnait carte blanche à la Russie de choisir en Pologne, selon sa convenance, telle province qu'elle jugerait à propos de prendre en possession. Le Roi demanda pour sa part la Pomérellie, le district de la Grande-Pologne en deçà de la Netze, l'évêché de Varmie, les palatinats de Marienbourg et de Culm, en laissant le champ libre aux Autrichiens pour accéder à ce traité, s'ils le jugeaient à propos. Tous les arrangements qui se prenaient à Berlin, comme à Pétersbourg, n'empêchaient point le prince Kaunitz de continuer