<68>de quoi il fut loué par les gens de robe, et désapprouvé par les politiques.
La France craignait alors que les brouilleries entre l'Espagne et le Portugal, au sujet du fort Saint-Sacrement, en Amérique, n'occasionnassent une rupture entre ces deux puissances. L'Angleterre ne le craignait pas moins, à cause qu'elle-même avait envoyé des troupes en Amérique, à Boston et dans d'autres colonies, pour apaiser le mécontentement que ces provinces marquaient du gouvernement de la mère-patrie. Si la guerre s'allumait entre le Portugal et l'Espagne, le roi d'Angleterre était obligé de secourir celui de Portugal; ce qui ne pouvait manquer de le commettre avec les Espagnols, qui, pour se venger, auraient assisté les colonies anglaises, et auraient par conséquent mis la nation en danger de perdre les possessions importantes de l'Amérique. Pour se tirer de ce pas embarrassant, la cour de Londres gagna l'empereur de Maroc, et le disposa tout de suite à déclarer la guerre à l'Espagne. En fournissant une occupation aussi sérieuse à la cour de Madrid, les Anglais se flattèrent de différer les hostilités entre l'Espagne et le Portugal, et de gagner également le temps de soumettre leurs propres colonies. Tant d'intérêts importants qui occupaient les Anglais, firent que, pour lors, ils perdirent l'Europe de vue.
Ces conjonctures favorisaient les intérêts du Roi : pendant que les Anglais et les autres puissances se trouvaient dans une situation embarrassante, et que, songeant à leurs propres intérêts, ils avaient moins d'attention à ce qui se passait dans le reste de l'Europe, le Roi avait moins à craindre de la jalousie importune des Anglais, qui se seraient à coup sûr mêlés des affaires qui regardaient le traité de partage. On essaya donc, à l'aide de la cour de Russie, de terminer les différends qu'on avait avec les Danzicois : les ministres de Prusse et de Russie négocièrent avec les maires et les syndics de cette ville infructueusement. Ils étaient si entêtés d'une espèce de despotisme en fait de commerce qu'ils s'étaient arrogé sur les autres villes situées le long de la Vistule, qu'ils auraient cru flétrir leur dignité en cédant sur la moindre bagatelle. Le ministre de Russie s'aperçut que, par les voies de la douceur, il ne ferait pas avancer sa négociation : il leur déclara