<137>et pour faire passer les droits de la couronne impériale à la tiare des pontifes. Grégoire III, surnommé le Grand,a fut le premier qui tenta de telles entreprises. Le pape Étienne, qui suivait le même projet, fit quelques pas de plus dans cette carrière. Chassé de Rome par Astolphe, roi des Lombards, il passa en France, où il couronna l'usurpateur Pepin, à condition qu'il délivrât Rome des Lombards. Le pape, de retour à Rome, pour presser les secours qu'il attendait de France, écrit une lettre au roi qu'il a couronné au nom de la Vierge, de saint Pierre et de tous les saints, dans laquelle il le menace de la condamnation éternelle, s'il ne le délivre au plus tôt des Lombards qui l'accablaient. Il avait donné le royaume de France, sur lequel il n'avait aucun droit, à Pepin, et Pepin lui donna, à ce qu'il prétendit, Rome et son territoire, qui appartenait proprement aux empereurs de Constantinople. Depuis, Charlemagne fut couronné à Rome par le pape, non qu'il crût tenir la couronne du pontife, mais parce qu'il est dit que Samuel oignit les rois Saül et David. Les souverains ne voulaient rendre hommage, par cette cérémonie, qu'à celui qui, d'un acte de sa volonté, élève, ébranle, soutient ou bouleverse les empires. Les papes ne l'entendaient pas ainsi. Dès le règne de Louis le Débonnaire, fils de Charlemagne, Grégoire IV, en exaltant sa puissance spirituelle au-dessus de la temporelle, fit sentir à cet empereur que son père tenait sa couronne et l'empire du saint-siége. Telle fut l'explication que les papes, interprètes des mystères, donnèrent au sacre des souverains. Ils étaient censés vicaires de Jésus-Christ, ils se disaient infaillibles, et on les adorait. Les ténèbres de l'ignorance allaient en s'épaississant de siècle en siècle : que fallait-il de plus pour étendre et pour accréditer l'imposture?
La politique du clergé, toujours active, faisait consécutivement de nouveaux progrès. Un moine, nommé Hildebrand, d'un caractère arrogant, austère et audacieux, plus connu sous le nom de Grégoire VII, jeta les vrais fondements de la grandeur papale.
a C'est Grégoire Ier, et non pas Grégoire III, qui fut surnommé le Grand. Dans son Abrégé de l'Histoire ecclésiastique de Fleury. A Berne, 1766, t. I, p. 178 et 179, le Roi donne, à la date de l'an 731, deux fragments des insolentes lettres que Grégoire III adressa à l'Empereur.