<43>surtout était sa plus belle comme sa plus noble partie : doux pour ceux qui l'approchaient, compatissant pour les malheureux, tendre pour ceux qui souffraient, humain pour tout le monde, il semblait partager le sort des affligés, il étanchait les pleurs des infortunés, il répandait abondamment sa générosité sur les indigents, rien ne lui était trop précieux pour qu'il ne l'employât au soulagement de ceux qui étaient dans le besoin. Je vous en atteste, ô familles malheureuses qu'il secourut de tout son pouvoir, vous, pauvres honteux, qui trouviez en lui une ressource toujours assurée, vous, malheureux de toute espèce, qui avez perdu en lui un bienfaiteur, un père! Ces excellentes dispositions lui étaient si naturelles, il se faisait si peu d'effort pour les mettre au jour, qu'on voyait évidemment qu'elles partaient d'une source pure et inépuisable. Faut-il qu'un destin ennemi l'ait fait tarir sitôt! Oublierai-je ce peu de jours qu'il passa à son régiment? Vous, ses officiers, et vous, vaillants cuirassiers, glorieux de servir sous ses ordres, en est-il aucun de vous qui me démente, si je dis que vous n'avez appris à le connaître que par ses bienfaits, et que ce prince si jeune pouvait vous servir de guide et de modèle?
Vous savez, messieurs, que le désintéressement parfait est la source d'où découle toute vertu : c'est lui qui fait préférer une réputation honorable aux avantages de la richesse, l'amour de l'équité et de la justice aux désirs d'une cupidité effrénée, les intérêts du public et de l'État aux siens propres et à ceux de sa famille, le salut et la conservation de la patrie à sa conservation personnelle, à ses biens, à sa santé, à sa vie; qui, en un mot, élève l'homme au-dessus de l'homme, et le rend presque un citoyen des cieux. Ce sentiment noble et généreux de l'âme se remarquait dans toutes les actions de notre prince. Combien ne forma-t-il pas de vœux pour la fécondité du mariage du prince de Prusse son frère! Et quoiqu'il ne pût se déguiser que la stérilité de cette union le rapprocherait du trône, il marqua la joie la plus sincère en apprenant la délivrance de la princesse sa belle-sœur,a regrettant seulement que ce ne fût pas un prince qu'elle
a Le 7 mai 1767, la princesse Élisabeth (t. VI, p. 17 et 25) mit au monde la princesse Frédérique-Charlotte-Ulrique-Catherine, qui épousa le duc d'York le 29 septembre 1791.