<213>teront du royaume des cieux! Et comme ils veulent que tout le monde se sauve, ils ont soin de rendre tout le monde indigent. O piété ecclésiastique, jusqu'où ne s'étend point votre sage prévoyance!
Rien ne devrait être plus édifiant que l'histoire des chefs de l'Église, ou des vicaires de Jésus-Christ; on se persuade d'y trouver les exemples de mœurs irréprochables et saintes; cependant c'est tout le contraire : ce ne sont que des obscénités, des abominations et des sources de scandale; et l'on ne saurait lire la vie des papes sans détester leurs cruautés et leurs perfidies.
On y voit en gros leur ambition à augmenter leur puissance temporelle et leur grandeur, leur avarice sordide à faire passer de grands biens, sous des prétextes injustes et malhonnêtes, dans leurs familles, pour enrichir leurs neveux, leurs maîtresses ou leurs bâtards.
Ceux qui réfléchissent peu trouvent singulier que les peuples souffrent avec tant de docilité et de patience l'oppression de cette espèce de souverains, qu'ils n'ouvrent point les yeux sur les vices et les excès des ecclésiastiques qui les dégradent, et qu'ils endurent d'un front tondu ce qu'ils ne souffriraient point d'un front couronné de lauriers. Ce phénomène paraît moins étrange à ceux qui connaissent le pouvoir de la superstition sur les idiots, et du fanatisme sur l'esprit humain; ils savent que la religion est une ancienne machine qui ne s'usera jamais, dont on s'est servi de tout temps pour s'assurer de la fidélité des peuples et pour mettre un frein à l'indocilité de la raison humaine; ils savent que l'erreur peut aveugler les hommes les plus pénétrants, et qu'il n'y a rien de plus triomphant que la politique de ceux qui mettent le ciel et l'enfer, Dieu et les démons en œuvre pour parvenir à leurs desseins. Tant il est vrai que la vraie religion même cette source la plus pure de tous nos biens, devient souvent, par un trop déplorable abus, l'origine et le principe de tous nos maux.
L'auteur remarque très-judicieusement ce qui contribua le plus à l'élévation du saint-siége. Il en attribue la raison principale à l'habile conduite d'Alexandre VI, de ce pontife qui poussait sa cruauté et son ambition à un excès énorme, et qui ne connaissait de justice que la perfidie. On ne saurait donc confondre sans une