52. AU CONSEILLER PRIVÉ DES FINANCES DE BORCKE A VIENNE.
Berlin, 22 août 1740.
J'ai reçu la relation que vous m'avez faite en date du 13 de ce mois, touchant les dispositions de la cour impériale par rapport à la succession de Juliers et de Bergue et celle d'Ostfrise. J'approuve que vous attendiez une occasion favorable pour mettre tout en œuvre, afin de pouvoir pénétrer, autant qu'il est possible, ce que je dois attendre <36>de la cour impériale sur deux articles de cette importance; et comme vous mandez que le comte de Kinsky vous a dit qu'à présent il se trouverait bien un moyen de faire gagner une autre face à l'affaire de Juliers et de Bergue, vous pouvez le sonder, comme de vous même, sur ce qu'il entend par ce moyen-là, etcomment il croit que l'Empereur pourrait se dégager des mesures et liaisons qu'il a prises avec la France sur cette affaire-là. Vous savez le langage qu'on a tenu jusqu'ici à Vienne par rapport au traité secret de l'an 1728, et combien on a biaisé de s'expliquer nettement si on se croyait obligé de la remplir ou non, le cas existant. Il faudra donc, à la première occasion qui se présentera, serrer le bouton là-dessus au chancelier, comte de Sinzendorff, et au baron de Bartenstein. La réponse que l'un et l'autre vous donneront, fera voir plus clairement ce que la cour de Vienne est en état de faire ou non. Tant qu'elle craindra pour ses États d'Italie, elle se portera très difficilement à une démarche qui pourrait irriter la France, sachant bien que celle-ci n'aurait qu'à lâcher la bride à l'Espagne, pour rafler les provinces qui appartiennent à la maison d'Autriche en Italie, et qui sont, comme tout le monde le sait, dansun si mauvais état de défense que la conquête n'en serait guère difficile aux Espagnols. Cette considération subsistera tant et aussi longtemps que l'Empereur ne se sera pas remis de l'état délabré où il se trouve, et il lui faudra des ressources très considérables, en bons et gros subsides de la part des Puissances maritimes, pour le remettre, à quoi pourtant jusqu'ici il n'y a guère d'apparence.
Au reste, je ne sais si ce que le chancelier, comte de Sinzendorff, doit avoir dit à l'occasion de la prétendue grossesse de la princesse d'Ostfrise, qu'il n'importait plus à présent tant qu'elle fût bien avérée, a été bien sincère, et si la cour impériale m'envie moins cette succession qu'elle n'a fait à feu le Roi mon père. Peut-être s'imagine-t'on que je ne mesoucie pas beaucoup de la poursuite de mes justes droits là-dessus, mais en ce cas-là, on se tromperait terriblement, et on ne saurait avoir cette affaire plus à cœur que je ne l'ai. Car pour croire que la maison d'Autriche dût avoir changé de principe et de système, pour l'amour de moi, et qu'elle voulût se prêter plus facilement à mon agrandissement qu'elle n'a fait à l'égard de mes ancêtres, voilà ceque j'ai bien de la peine à me persuader. Mais en tout cas, il ne tiendra jamais à moi que la cour impériale ne ressente l'effet des bonnes dispositions d'un prince qui lui est aussi attaché et si fort porté pour une bonne union et harmonie avec elle, que je le suis; dont vous pouvez assurer les ministres de l'Empereur, toutes les fois que, l'occasion s'en présentera.
Federic.
H. de Podewils.
Nach der Ausfertigung.
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