<12> témoigner avoir conçus sur la Scanie; que Sa Majesté Danoise parlait constamment de la guerre et témoignait avoir des desseins sur la Scanie comme la possession de ses pères; qu'il en entretenait la Reine journellement et qu'il en était tout occupé.
Il est assez problématique de juger dans quel dessein on en a parlé si clairement au Prince; car, si on envisage réellement un pareil dessein, il serait de la dernière imprudence d'en laisser transpirer la moindre chose, de sorte que je n'ai pu d'abord regarder ce propos du roi de Danemark que comme un conte fait à plaisir pour se donner peut-être un air de conquérant; mais en comparant ce propos avec l'état où sont les affaires à la cour de Danemark, j'ai cru qu'il méritait quelque réflexion; c'est pourquoi je veux que vous en instruisiez dans la dernière confidence [le marquis de Saint-Contest], à quelque occasion, quand vous sauriez l'entretenir seul, et après avoir tiré de lui sa parole qu'il m'en garderait le secret le plus absolu là-dessus, ni ne nommerait surtout jamais le prince de Brunswick qui m'a fait part de ce propos, puisque, si jamais la moindre chose en transpirait, je ne saurais que m'attendre à beaucoup d'inconvénients et à perdre tous les canaux par où je puis tirer des avis utiles et intéressants; enfin, que vu l'estime particulière que j'avais pour M. de Saint-Contest, et la confiance sans bornes que j'avais mise en lui, je lui faisais part de cette anecdote, me fiant absolument sur sa discrétion.
Au surplus, l'on remarque à la cour de Copenhague que le baron de Bernstorff s'est appliqué à faire naître au roi de Danemark le goût militaire, en quoi il paraissait qu'il n'avait pas mal réussi. L'on en peut, je crois, inférer que c'est apparemment ce ministre qui pourrait bien lui avoir fait envisager de loin la possibilité de la conquête du patrimoine de ses ancêtres et qu'un tel point de vue eût fait une vive impression sur l'esprit du Roi son maître. Au reste, ces vraisemblances se fortifient par l'avis que j'ai que par les pratiques continuelles du ministre de Bernstorff et par ses insinuations la cour de Danemark se croit à l'heure qu'il est infiniment supérieure à celle de Suède, de sorte que quelqu'un là, confident du ministre et qui est bien informé de ses sentiments, a fait entendre depuis peu que ce n'était plus le temps aujourd'hui où il était de l'intérêt du Danemark d'être lié avec la Suède.
L'on remarque, au surplus, que la conduite qu'on tient là avec les ministres étrangers, y répond parfaitement; qu'on ne cherche qu'à endormir le ministre de Suède et que l'on remarquait toujours entre les ministres du parti opposé et le ministère danois une parfaite intelligence, et que le ministre de l'Empereur1 paraissait même plein d'espérance; qu'au reste les campements étaient réglés de manière qu'il y en aurait près de Copenhague du temps de la Diète future en Suède, et
1 Rosenberg.