Vous lui direz purement que j'étais dans de grandes appréhensions que les soins qu'on employait pour ramener la Russie à l'Angleterre, soient trop tard, et que je craignais que la première ne fasse que nous amuser encore, pour qu'en attendant nous manquassions le temps pour prendre d'autres liaisons efficaces; ce qui cependant était le plus nécessaire dans le moment présent.
Vous verrez par la copie ci-jointe d'une lettre que je viens de recevoir du ministre Schlabrendorff, et que vous mettrez en français, pour la faire lire au sieur Mitchell, ce qu'il me marque au sujet des arrangements militaires que les Autrichiens prennent actuellement en Bohême et en Moravie. Cet avis est conforme à ce que le sieur de Klinggrseffen nous a marqué à ce sujet par la dernière dépêche que nous avons eue de lui,1 et encore à d'autres qui me sont revenus, de sorte qu'il ne faut nullement douter de leur authenticité. Ainsi vous direz au sieur Mitchell que d'ici en deux mois j'aurais trois camps considérables des Russes et des Autrichiens sur mes frontières.
J'ai réfléchi sur l'intention que la cour de Vienne saurait avoir en ceci, et je n'ai trouvé que deux choses, savoir qu'en premier lieu cette cour voudra entreprendre l'automne qui vient l'élection d'un roi des Romains en faveur de l'Archiduc aîné, et que, craignant peut-être que je ne sache traverser cette affaire, elle voudra me tenir en échec par ces deux grands corps d'armée qu'elle fera camper sur mes frontières. Le second but peut être qu'elle voudra instiger la Russie, pour m'attaquer en Prusse, et pour me tomber alors sur le corps de son côté dans ce pays-ci, en traversant la Saxe, selon le projet que ladite cour, à ce que je sais, a pris.
En communiquant tout ceci au sieur Mitchell, vous finirez par lui dire que, quoiqu'il n'y ait pas de fait encore un nouveau traité entre nous, je me confiais, nonobstant cela, à l'Angleterre et à son assistance qu'elle me prêtera. J'attends le rapport que vous me ferez sur la façon dont le sieur Mitchell se sera expliqué sur ceci.
Quant au rapport que vous m'avez fait du 19 de ce mois touchant les instances du comte Puebla au sujet de son secrétaire échappé, vous lui direz que j'avais donné mes ordres pour faire des perquisitions contre celui-ci et de l'arrêter, s'il se trouve au lieu que lui, comte Puebla, m'avait indiqué, comme vous le verrez par la copie ci-jointe [de l'ordre] que j'ai donné en conséquence,2 et que c'était tout ce que l'on saurait raisonnablement prétendre de moi, et qu'au surplus je donnerais mes ordres au sieur Kircheisen,3 pour qu'on examinât la belle-mère4 sur le lieu où son gendre saurait se trouver actuellement. Et, sur ce, je prie Dieu etc.
Federic.
1 Nr. 7595.
2 Die Ordre ist abgedruckt am Schluss der Flugschrift „Kurze Abfertigung der sogenannten Beantwortung des wienerschen Hofes auf das Königlich preussische Manifest. Berlin 1756.“
3 Die Antwort Kircheisen's nebst dem Verhörsprotocoll datirt Berlin 23. Juni.
4 Verwittwete Bürgermeister Witte.