7284. AU CONSEILLER PRIVÉ DE GUERRE DE KLINGGRÆFFEN A VIENNE.

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Klinggräffen berichtet, Wien 11. Februar: „A moins que Votre Majesté ne puisse encore compter d'une certaine façon sur le parti que prendra la France après la conclusion de la convention entre Elle et l'Angleterre, il y a des apparences très plausibles que cette cour-ci se liera avec la première. Je ne doute pas que le but ici n'ait été, ainsi que je l'ai marqué, de se mettre en état, afin que, lorsque les affaires seraient brouillées, de profiter des circonstances et de paraître sur la scène. Sans doute qu'on est fort fâché de voir le coup manqué, le roi d'Angleterre se liant „avec Votre Majesté; par conséquent, on doit s'attendre qu'on se retournera d'un autre côté : ce ne peut être que du côté de la France. J'y donne toute l'attention possible pour éclaircir la chose, et je crois être en état de soupçonner avec beaucoup de plausibilité que la chose est fondée. Car il m'est revenu que l'Impératrice-Reine a dit peu de jours avant l'arrivée du dernier courrier de Londres: &ä#187;Le roi d'Angleterre me boude, mais j'ai pris mon parti.“ Ce qui prouve que cette Princesse a été informée de cette négociation. De plus, j'ai été témoin oculaire, il y a quatre jours, lorsque le comte Kaunitz s'empara du vicomte d'Aubeterre, le soir à la petite assemblée, et le tira dans un coin, ce qu'il n'avait jamais fait ci-devant, où ils s'assirent. Le premier lui parla à l'oreille pendant plus d'une demi-heure, avec un air

Potsdam, 21 février 1756.

Votre rapport du 11 de ce mois m'est bien parvenu. Je ne doute nullement que la cour de Vienne, dépitée qu'elle est à présent contre celle de Londres, ne veuille profiter du refroidissement qu'elle suppose être arrivé dans la conjoncture présente entre la France et moi, pour ourdir quelque chipotage secret avec la première; mais, quoi qu'il en soit, je veux bien vous faire observer qu'en premier lieu l'on peut calculer à peu près jusqu'où cela pourra aller; car, pour le reste, vous savez que leurs intérêts sont trop opposés les uns contre les autres que jamais ils sauraient être mêlés ensemble. En second lieu, il faut que vous songiez que jamais la France ne méconnaîtra ses intérêts au point de vouloir travailler à l'agrandissement de la nouvelle maison d'Autriche, et que, si jamais le cas existait que ces deux puissances formassent une ligue entre elles, il s'en formerait d'abord une autre capable de les contre-balan-

comme s'il voulait l'endoctriner et le persuader, tandis que le dernier ne fit qu'écouter avec attention, comme un homme qui ne sait trop que répondre; il se trouve dans le cas, ne pouvant encore savoir l'intention de sa cour. Après cet entretien fini, je me retirai, étant assez tard, mais je sais qu'après cela ils ont repris la conversation dans le même coin au delà d'une demi-heure. Le sieur Keith en a été informé par une personne de ses amis, qui a été témoin oculaire, et m'en a averti avant-hier dans la comédie, ajoutant qu'entre toutes les sottises qu'avait faites cette cour-ci, celle de se lier avec la France, serait la plus grande. Je puis me tromper, mais je ne suis pas entièrement de son sentiment, sur quoi je ne m'expliquai pas avec lui, et les choses poussées avec vigueur entre les deux puissances pourraient devenir dangereuses dans l'exécution du plan qu'elles pourraient arranger. Le sieur Keith convient que cette cour est sans doute très piquée, dès qu'on lui fait connaître qu'on peut se passer d'elle … Le vicomte d'Aubeterre est, au reste, inconsolable. Il m'a fait dire par un ami commun, d'une manière fort polie, combien il regrettait que l'évènement survenu le privât de me voir comme ci-devant, me demandant mon amitié et m'assurant de la sienne.“

cer,128-1 de sorte que je crois que, si d'abord et dans les premiers mouvements de dépit des ministres des deux cours s'est levée parmi eux une idée vague d'une telle ligue, l'exécution n'en ira pas si vite, quand après ils y réfléchiront. Au reste, que tout cela ne vous empêche pas de veiller d'une attention extrême sur tout ce qu'on peut chipoter à ce sujet, afin de m'en pouvoir informer exactement.

Pour satisfaire d'ailleurs à ma curiosité, mandez-moi si la vanité autrichienne ne se trouve pas mortifiée de ce que deux électeurs ont décidé la neutralité de l'Empire, sans en avoir consulté l'Empereur en chef de l'Empire. Je m'imagine que, quelque effort que les ministres autrichiens fassent pour dissimuler leur chagrin sur cet évènement, qu'il faut cependant qu'on en lise en public dans leurs yeux le dépit et la rage qu'ils en ont.

Quant au vicomte d'Aubeterre, je serai bien [aise] qu'autant que les circonstances le voudront permettre, vous viviez sur le même pied qu'autrefois avec lui, et vous pouvez bien lui dire que, jusqu'à présent, je n'étais point brouillé avec sa cour, qui n'ignorait pas à cette heure ce que c'était que la convention en question.

Pour ce qui regarde les arrangements128-2 de la cour où vous vous trouvez, j'attendrai les nouvelles que vous m'en marquerez.

Federic.

Nach dem Concept.



128-1 Vergl. B. II, 213.

128-2 Vergl. S. 122.