7928. AU CONSEILLER PRIVÉ DE LÉGATION BARON DE KNYPHAUSEN A PARIS.

Potsdam, 27 août 1756.

Votre rapport du 15 de ce mois m'est bien entré. Le dernier courrier du sieur de Klinggræffen m'a apporté hier293-3 la réponse de l'Impératrice-Reine à ma seconde déclaration que je lui ai fait faire; mais comme cette réponse ne renferme proprement qu'un fier démenti de cette Princesse sur le concert qui doit subsister entre elle et la cour de Russie, afin de m'attaquer ensemble inopinément, sans qu'elle y touche d'un seul mot la question principale, savoir de ne vouloir m'attaquer ni pendant le cours de cette année-ci, ni de la prochaine — de quoi je vous ferai communiquer incessamment tout le détail293-4 — son armée ne se trouvant non seulement en campagne et sur le point de venir camper tout proche de mes frontières de la Silésie, mes troupes n'ayant jusqu'ici tendu pas même une seule tente, je me vois enfin, toute considération faite, obligé de prendre des mesures pour ma sûreté et de me mettre à cette fin en marche avec mon armée.

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Je ne saurais vous cacher à cette occasion que, la situation où je me trouve actuellement, étant critique et des plus embarrassantes, aucune considération ne saurait m'empêcher de prendre mes mesures de manière à ne pas me laisser opprimer impunément par mes ennemis, et de me servir des seuls moyens qui me restent pour me tirer de l'oppression de la cour de Vienne et pour prévenir l'effet de ses mauvaises intentions contre moi.

Federic.

P. S.

294-1 Au surplus, comme il n'y a guère à douter qu'on ne jette en France de hauts cris au commencement de ce que je suis entré en Saxe avec mon armée pour passer en Bohême y chercher mon ennemi, et de ce que le beau-père du Dauphin en souffrira, vous devez alléguer en termes modestes à ceux qui vous en parleront, que, dans la guerre pour la succession de l'Espagne, le duc de Savoye294-2 alors régnant était le beau-père du Dauphin et encore du roi d'Espagne, et que, malgré cela, la France se vit dans la nécessité de faire désarmer ses troupes et d'attaquer ses États, et que de grands princes, quand cela regarde le point de leur propre conservation, n'ont point de parents, et que d'ailleurs l'on ne consulte pas les généalogies, quand on a des ennemis qu'il faut prévenir par une nécessité absolue, pour ne pas s'exposer aux derniers malheurs; qu'au reste l'expérience m'avait fait connaître la cour de Saxe et que je ne saurais laisser derrière moi un ennemi qui me saurait frapper le coup mortel, dès qu'il se serait aperçu que je serais occupé entièrement à d'autres lieux; que, si la France voulait envisager sans prévention mes circonstances, elle verrait clairement que je ne faisais rien à quoi ma propre conservation et ma sûreté ne me forçassent, et que je n'avais pu absolument ni éviter, ni m'en dispenser.

Federic.

Nach dem Concept.



293-3 Vergl. S. 278. 285.

293-4 Vergl. S. 294 Anm. 1.

294-1 Ein vorangehender Theil des P. S. für Knyphausen bestand, wie eine Bemerkung Eichel's zeigt, aus einer Wiederholung des P. S. für Michell von „Après vous avoir déjà fait“ bis „tranquille possession de ses États“ . Vergl. Nr. 7924. 7927.

294-2 Victor Amadeus 11. November 1703.