9781. AU LIEUTENANT-GÉNÉRAL PRINCE FERDINAND DE BRUNSWICK.
Breslau, 17 février 1758.
Monsieur mon Cousin. Les lettres de Votre Altesse du 9 et du 11 de ce mois m'ont été fidèlement rendues, et [je] vous sais bien du gré des nouvelles que vous avez eu l'attention de me faire communiquer à leur suite. En revanche, j'ai bien voulu vous communiquer celles que mes dernières lettres de Londres renferment, savoir : que les ministres de la cour de Londres persistaient dans la ferme et inébranlable résolution à ne point envoyer de troupes anglaises sur le continent,250-2 sur le danger, à ce qu'ils s'expliquent, qu'il y avait pour l'intérêt de la cause commune d'insister là-dessus, crainte d'une dissolution de la présente administration, et crainte que cela ne replonge la cour de Londres dans le même état de division et d'irrésolution où elle s'est trouvée l'année dernière,250-3 au lieu que, demeurant dans le système qu'elle a adopté relativement aux affaires du continent, on était assuré de quelque chose et d'une stabilité dans le ministère, comme aussi des secours qu'on pouvait donner à l'électorat et à moi, qui n'existeraient, sans cela, point ou seraient du moins fort incertains ou peu durables autrement; enfin que la nouvelle administration ne se départirait jamais des principes qu'elle avait adoptés relativement aux affaires du continent.
Quoique ces nouvelles ne soient guère consolantes, je crois cependant entrevoir un moyen pour y remédier encore, qui est celui qu'aussitôt que Votre Altesse aura fait repasser le Wéser aux Français, vous tiriez tout le monde que vous pourrez retirer depuis le Brunswick jusques sur vos lieux, afin de remettre complètes de cette façon-là [les] troupes sous vos ordres. En second lieu, que vous fassiez d'abord un projet pour augmenter de 10,000 hommes l'armée sous vos ordres, et<251> envoyiez ce projet au roi d'Angleterre, par quelle augmentation vous vous trouverez sûrement en état de résister à l'ennemi pendant la campagne qui vient.
Quant aux opérations militaires, je prie Votre Altesse d'avoir la bonté de porter toujours Ses vues en avant, et alors vous remarquerez bientôt quand et où il sera temps de donner bataille, parceque, si vous ne la donnez pas en cet état-là, il peut vous arriver des accidents fâcheux qui vous forcent et vous obligent à vous battre, comme il arriva fâcheusement au duc de Bevern,251-1 quand vous n'y êtes préparé ni arrangé.
De cette façon-là, un général peut agir de la même façon qu'un roi, qui agit aussi selon les règles, mais qui entreprend courageusement comme un général, quand il tient toujours les choses préparées, et quand il s'agit du bien des affaires et de l'État.251-2 Comme je ne doute point que vous ne tâchiez de pousser avec bien de la vivacité les Français, je vous prie de penser à l'évêché de Paderborn, quand vous aurez passé le Wéser. Je suis avec toute la considération et estime possible, Monsieur mon Cousin, de Votre Altesse le bon et très affectionné cousin
Enfin, mon cher, j'espère avoir bientôt de bonnes nouvelles de vos opérations. Il faut travestir vos pleutres en héros,251-3 et pourvu qu'ils aient quelque avantage sur les Français, vous verrez fanfaronner vos lourdauds, et vous pouvez les mener au diable; mais je prévois qu'il faudra donner un bon coup de collier. Cependant, voilà un nouveau général251-4 qui arrive le moment que toutes les humeurs sont en fermentation, et que peut-être Villemur251-5 aura commencé à faire des dispositions. Cela doit donner lieu à bien des tracasseries, à des ordres opposés, des mesures changées, toutes circonstances dont vous pourrez profiter.
Federic.
Nach der Ausfertigung im Kriegsarchiv des Königl. Grossen Generalstabs zu Berlin. Der Zusatz eigenhändig.
250-2 Vergl. S. 229.
250-3 Vergl. Bd. XV, 489.
251-1 Vergl. S. 53.
251-2 Prinz Ferdinand hatte, Lüneburg 9. Februar, geschrieben: „Un général agit autrement que le souverain qui commande ses armées, et ce qui n'est qu'audace dans le second, est taxé de témérité dans le premier, dont on ne manque jamais de le rendre responsable, si la fortune lui est contraire.“
251-3 Vergl. S. 219,
251-4 An die Stelle von Richelieu trat seit Anfang Februar der Graf Clermont als Oberbefehlshaber der französischen Truppen. Vergl. S. 191. Anm. z.
251-5 Vorlage: Vilmur.