10668. AU PRINCE HENRI DE PRUSSE.
Breslau, 19 janvier 1759.
Mon cher Frère. Je vous crois à présent à Berlin, cependant je vous réponds sur nos affaires tout comme si vous étiez encore à Dresde.
Je ne puis m'empêcher de croire que les ennemis préparent quelque entreprise. Les lettres de France et celles de l'Empire l'annoncent, sans cependant articuler distinctement en quoi elle consistera; pour moi, je crois que, si la bombe crève, ce sera sur le prince Ferdinand,1 et que le corps qui va s'établir dans le pays de Gotha,2 y est envoyé, pour nous couper la communication de son armée et des secours qu'on pourrait y envoyer. Ce qu'il y a de certain, c'est qu'il ne faut plus penser à la paix depuis la chute de Bernis,3 quoique nos ennemis sont épuisés, et qu'ils annoncent eux-mêmes qu'ils vont faire le dernier effort cette année; cela doit nous avertir de mettre tout en œuvre, pour être instruit autant que possible des desseins et des complots qu'ils trament.
Vous me dites le roi d'Espagne à l'agonie;4 il faudrait une peste parmi les souverains de l'Europe, pour nous mettre à l'aise; mais enfin il faut s'abandonner à son sort, et puisque le nôtre veut la guerre, ne devons notre salut qu'à notre épée!
Pourvu que vous me procuriez 3000 hommes passables en Saxe,5 c'est tout ce qu'il me faut, et je vous en rendrai grâce. Vous priant d'ajouter foi à la tendresse sincère avec laquelle je suis, mon cher frère, votre fidèle frère et serviteur
Federic.
Nach der Ausfertigung. Eigenhändig.
10669. AU ROI DE LA GRANDE-BRETAGNE A LONDRES.
Breslau, 19 janvier 1759.
J'ai reçu avec d'autant plus de plaisir la lettre de Votre Majesté qui est une preuve de Son entière reconvalescence, dont je La félicite de tout mon cœur, personne n'y prenant plus de part, ni ne s'intéressant plus que je le fais, à Sa conservation.
Les affaires n'ont point changé depuis mes dernières lettres. Les Suédois sont recognés près de Stralsund. Les Autrichiens ne remuent guère dans leurs quartiers. Les Russes reçoivent des secours, ils sont sur la Vistule, d'où ils menacent d'une invasion nouvelle trois de mes
1 Vergl. Bd. XVII, 424. 432.
2 Vergl. Nr. 10671.
3 Vergl. S. 1. 31,
4 Vergl. S. 23. 30.
5 Am 17. Januar war an Prinz Heinrich die Weisung ergangen, falls die sächsischen Stände die Rekrutenlieferung „in das Weite spielen oder auch wohl gar refusiren wollten“ , so sollte der Prinz die sächsischen Kreise, die Rekruten zu liefern hätten, unter die Regimenter vertheilen und diese „beordern, dass sie die aufzubringende Anzahl Rekruten selbsten ausheben und wegnehmen müssen“ . „Sollten dabei alsdann Excesse und Plackereien geschehen, wie es schwerlich zu verhindern ist“ , so hätten die sächsischen Stände solches sich selbst zuzuschreiben. Uebrigens solle „durchaus kein Rekrute unter 4 Zoll angenommen werden“ .