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Voici, ce me semble, quelques réflexions qu'il ne sera pas hors de propos de communiquer à Knyphausen,1 savoir : que les Anglais profitent incessamment des ouvertures des Français pour en faire usage en Russie, s'entend pour montrer aux Russes qu'ils sont les maîtres des conditions de paix, et que, par conséquent, rien ne sera plus avantageux aux Russes que de se hâter à faire bonne composition; par quoi je crois qu'on pourra les déterminer à rendre mes conditions plus avantageuses, que si ces gens se croyaient toujours également étayés de la France, de sorte qu'à bien envisager tout ceci, il ne restera que l'obstination de la cour de Vienne à vaincre; mais l'épuisement total de ses finances, l'abandon de ses principaux alliés et surtout, si nous finissons heureusement cette campagne et si nous nous remettons promptement en posture, il est à croire que, la paix signée avec toutes les autres puissances, sa fierté fléchira vers le printemps prochain.

Ma santé, quoique faible, commence à se remettre, et je me flatte que dans six jours je pourrai me rendre en Saxe, quoique hors d'état d'agir avec toute la vigueur possible, et donner l'impulsion aux affaires pour finir la campagne le plus vite.

Federic.

Nach der Ausfertigung.


11557. AU MINISTRE D'ÉTAT COMTE DE FINCKENSTEIN A MAGDEBURG.

Kœben, 30 octobre 1759.

Secret! Voici mes réflexions sur la situation présente des affaires en Europe que vous ferez transposer dans le chiffre de Knyphausen, pour les envoyer,2 incontinent après, à ce ministre :

Après les éclatants succès que les Anglais ont eus en Amérique, sur mer et en Allemagne, la France se trouve abîmée sous la puissance de l'Angleterre et obligée, par conséquent, à recevoir les conditions de la paix qu'il plaira à l'Angleterre de lui imposer. Cela est si manifeste que la dernière démarche des Français, en égard aux propositions dont M. de Choiseul a chargé M. de Bernstorff,3 en [fait] foi. La Russie, d'un autre côté, alarmée des résolutions que la France pourrait prendre, craignant d'un côté la perte des subsides et de l'autre de ne jouer aucun rôle à la pacification générale, marque quelque empressement pour acheminer son accommodement. Avec la disposition de ces deux cours et l'Angleterre dans la situation brillante où une puissance puisse se trouver en Europe, il ne s'agit que d'un peu d'art, de manège et d'adresse dans la négociation, pour en tirer le plus grand avantage.

J'entre avec vous dans le détail des intérêts de l'Angleterre et des miens, pour qu'après vous avoir détaillé toutes mes idées, vous puissiez



1 Dies geschieht durch Ministerialerlass, Magdeburg 4. November.

2 Geschieht ebenfalls am 4. November.

3 Vergl. Nr. 11556.