10781. AU PRINCE HENRI DE PRUSSE.

[Breslau,] 17 mars 1759.115-2

Mon cher Frère. Je crois que vous devez avoir reçu, il y a quelques jours, ma lettre où je vous rends compte des mouvements de<116> l'ennemi et des dispositions préalables que j'ai faites pour être le 24 avec l'armée en quartiers de cantonnement entre Jauer et Schweidnitz.116-1 Je vais à présent vous dire ce que je sais de positif touchant les intentions de l'ennemi et ce que je crois devoir faire dans des cas qui pourront arriver.

Je sais positivement que le projet favori de la cour de Vienne a été rejeté en France;116-2 je sais qu'ils ne sont pas d'accord avec les Russes, et que, par conséquent, ils ont formé un autre projet. Je ne puis pas jusqu'au moment présent vous dire positivement sur quoi il roule, mais il est néanmoins indubitable que la Silésie y entre pour beaucoup. Je prends mes quartiers entre Schweidnitz et Jauer, pour être à portée de tout; j'y serai avec 40 bataillons et 58 escadrons sans hussards.

Si vous avez les troupes des Cercles qui voudront aller droit à Halberstadt, d'un côté, et que vous n'ayez que des pandours ou Laudon vis-à-vis de Dresde, je vous crois en état de vous opposer à ces deux corps; mais si Leopold116-3 y vient, je fais fond d'y marcher avec 20 bataillons et 30 ou 40 escadrons qui, joints aux 8 bataillons qui sont à Dresde, me fourniront tout ce qu'il me faut de troupes dans les montagnes, pour le contenir jusqu'à ce que vous aurez renvoyé les Cercles, et en cas de besoin je pourrai encore vous fortifier de cavalerie.

Quant à ce pays-ci, j'ai laissé à Fouqué 20 bataillons, sans ceux qui occupent les garnisons, pour défendre la Haute et la Basse-Silésie.

Si l'ennemi se détermine à vouloir faire de grands efforts et pénétrer avec deux armées en Silésie, je ne marcherai point en Saxe, et en ce cas, comme il emploiera ici ce qu'il a de plus considérable, il n'en sera que plus faible vis-à-vis de vous; si, outre cela, l'ennemi cache encore quelques corps, comme on le, débite, du côté de Gabel, pour pénétrer subitement à Berlin, dans un temps qu'un dérangement nous serait arrivé, c'est à moi d'y veiller de la Silésie. Dès que je serai en cantonnement, l'ennemi fera quelque mouvement qui le démasquera davantage, et qui nous donnera lieu de nous déterminer à quelque chose de plus précis; car, jusqu'à présent, il ne faut rien précipiter, ni il ne faut que je fasse des mouvements qui découvrent mon jeu.

Vous voyez par ma position que je suis la réserve de l'armée et prêt à tourner du côté où le danger le plus éminent m'attirera; jusqu'à présent je n'en saurais faire davantage, et je compte mesurer toutes mes démarches sur celles de l'ennemi, la première attention consistant jusqu'ici à nous opposer avec une certaine proportion aux corps et aux armées avec lesquelles il se propose de nous attaquer. Il faut donc que<117> les hussards de Puttkammer restent du côté de Spremberg,117-1 pour que [je] sois averti promptement de ce qui se passe chez vous, et que j'aie assez d'informations pour pouvoir régler mes démarches. Je vous communiquerai de même jusqu'aux moindres nouvelles des ennemis; car ce ne sera qu'à force de combiner ces nouvelles, que nous parviendrons à juger sûrement de ses projets.

Je vous prie, n'oubliez pas de faire jeter des arbres dans l'Elbe dans différents endroits; si cela pouvait commencer du côté de Schandau, cela serait excellent.

Il y a 6000 winspel de farine à Magdeburg à votre disposition; au cas que vous soyez obligé de tourner vers Leipzig, ils viendront très à propos, et quand même nous n'irions pas vers ces cantons, ils ne seront pas perdus, et on peut les conduire, par le moyen de l'Elbe, où l'on en aura besoin.

Adieu, mon cher frère, n'épargnez ni papier ni encre ni chasseurs dans ces conjonctures, et écrivez-moi souvent, pour que nous ne puissions pas nous reprocher d'avoir négligé quelque chose par notre faute. Je suis avec une parfaite estime, mon cher frère, votre fidèle frère et serviteur

Federic.

Nach der Ausfertigung. Eigenhändig. 117-2



115-2 Auf dem Bericht des Generalmajors von Angeld Ii, Landshut 11. März, findet sich die Weisung zur Antwort: „Ein Officier, der keine Rechnung von den ihm anvertraueten Werbegeldern geben kann, hat gestohlen und also eine Infamie begangen, dass er weggejaget werden muss.“ Auf dem Bericht vom 12. die Weisung: „Ich kann an Leuten, die sich überfallen und das ihrige nehmen lassen, keine Bonification thun, überdem müssen die Freibataillons nicht viel Equipages haben, sondern ganz leichte sein.“ Die auf Grund dieser Weisungen [Bleinotizen] aufgesetzten Cabinetserlasse an Angelelli datiren vom 16. März.

116-1 Vergl. S. 119. 126.

116-2 Vergl. S. 106.

116-3 Daun.

117-1 Vergl. S. 107.

117-2 Mit einem Kanzleischreiben vom 17. März wird dem Prinzen Heinrich die Instruction für die Generalmajors von der Kavallerie übersandt. Vergl. Œuvres Bd. 30, S. 165.