11245. AU CONSEILLER PRIVÉ DE LÉGATION BARON DE KNYPHAUSEN ET AU SECRÉTAIRE MICHELL A LONDRES.
Schmottseifen, 20 juillet 1759.
Les dépêches du 6 de ce mois dont vous avez chargé mon courrier à son retour, m'ont été fidèlement rendues, et j'ai été bien aise d'apprendre les nouvelles qu'elles comprennent tant au sujet du bon pli que les négociations du landgrave de Hesse-Cassel427-2 prennent, autant que les conjonctures présentes le savent permettre, que relativement à l'expédition mise en œuvre sur Canada que celle de l'amiral Rodney,427-3 que je souhaite du fond de mon âme qu'elles soient toutes deux couronnées de tout le succès désirable.
J'ai appris, d'ailleurs, avec toute la satisfaction possible ce que vous m'avez mandé de l'impression que ma lettre écrite à Sa Majesté Britannique427-4 a faite sur son esprit, et sa réponse m'a tout-à-fait rassuré sur les légères atteintes de soupçons qui sauraient s'élever en moi que les circonstances présentes très difficiles et critiques sauraient impatienter ce prince jusqu'à écouter les insinuations d'une certaine clique pour le tourner à une négociation de paix précipitée et plâtrée. Ce que vous me mandez d'ailleurs des bonnes suites que ma lettre a eues par rapport aux ministres là, m'a fait infiniment plaisir, et j'attendrai à son temps ce que vous me marquerez du résultat de vos conférences avec ces ministres sur les mesures convenables à prendre pour l'exécution<428> de ma démarche proposée, au sujet desquelles vous faites très bien de voir venir ces ministres.
Pour ce qui regarde les insinuations que le Roi vous a faites à différentes reprises de donner de la jalousie aux Français pour tirer le prince Ferdinand de la situation embarrassante où il se trouve, par quelque mouvement que mon frère Henri fera, au cas que les conjonctures le voudraient permettre, vous pourrez assurer le Roi ou ses ministres que de ma part je n'oublierais assurément rien de tout ce qui saurait contribuer pour tirer le Prince de sa situation gênante, mais qu'il y avait encore cette maudite circonstance que Daun se tenait inébranlablement derrière ses retranchements, et que, jusqu'à présent, les Russes faisaient le même. Que, d'ailleurs, mondit frère, ayant encore 20 000 Autrichiens vis-à-vis de lui, qu'il était obligé d'observer avec à peu près le même nombre de troupes sous ses ordres, ne saurait à présent rien détacher après le gros détachement qu'il avait déjà fait contre les Russes.428-1 En attendant, dès que Daun ou l'armée des Russes se remuerait, et qu'il se sera décidé quelque chose à notre faveur avec l'un ou l'autre, je ne perdrai aucun moment de songer à soulager le prince Ferdinand par quelque diversion contre les Français, sans attendre même qu'on m'en parlât de la part de l'Angleterre, et qu'on saurait être positivement persuadé là-dessus que je ferais de mon propre mouvement tout ce qui serait humainement possible. Que l'entreprise ne serait pas aussi tout-à-fait impossible, dès qu'il se serait décidé quelque chose, soit contre les Autrichiens soit contre les Russes; car je pourrai aisément alors détacher mon frère Henri vers Cassel, à moins que je ne sois obligé de changer de plan, si malheureusement les Français se fussent emparés de Minden, ce que je me flatte cependant que le prince Ferdinand tâchera d'empêcher, au sujet duquel je ne saurais dissimuler que j'ai été un peu en peine sur des traces d'irrésolution que j'ai cru remarquer en lui, tout comme Sa Majesté Britannique, depuis le mauvais succès de son affaire à Bergen,428-2 après laquelle j'ai senti que, nonobstant tout ce que je lui ai écrit pour le rassurer, et malgré ce que je lui ai fourni d'instructions pour agir, il m'a paru ne pas pouvoir se déterminer à aucun parti vigoureux à prendre. Je me flatte, cependant, que les lettres gracieuses que le Roi lui a faites, opéreront un bon effet sur lui.
Federic.
A présent, tout est en fermentation. Les Russes sont marchés de Posen, et, dans peu, il y aura quelque chose de décidé; c'est sur quoi Daun attend.
Federic.
Nach dem Concept. Der Zusatz eigenhändig auf der im übrigen chiffrirten Ausfertigung.
<429>427-2 Vergl. S. 363.
427-3 Admirai Rodney sollte mit Brandern und Bombenschiffen in den Hafen von Havre einzudringen versuchen, um an die dortigen Werfte und Magazine Feuer anzulegen.
427-4 Vergl. Nr. 11112.
428-1 Unter Hülsen. Vergl. S. 258. 359. 420.
428-2 Vergl. S. 181. 387.