<199> pas que mes ministres vous en auront déjà informé,1 mais dirai seulement en précis de quoi il s'est agi dans cette conversation, selon le rapport que le sieur Yorke en a fait à sa cour et qu'il a bien voulu faire lire confidemment au sieur de Hellen.
Il s'agit donc que ce comte de Saint-Germain a débuté d'abord pour se donner pour bon Anglais et Prussien, qualité qui le faisait regarder de bon œil aujourd'hui à Versailles, et ayant ajouté qu'il s'estimerait fort heureux, si, par ses soins et un peu de crédit qu'il pourrait avoir à la cour de France, il pouvait contribuer à terminer cette funeste guerre, et qu'il croyait pouvoir assurer que la chose, si on voulait répondre un tant soit peu aux désirs sincères de la France, ne serait pas impossible d'en voir la fin. Sur quoi le sieur Yorke l'ayant interrompu, pour lui dire que c'était une matière trop délicate pour en parler à quelqu'un dont on ne savait pas la vocation qu'il avait pour en traiter, ni jusqu'où il pouvait y être autorisé ou non, le comte a repris qu'à la vérité il n'était pas muni de lettres de créance en forme, mais qu'il pouvait lui montrer quelques pièces qui prouveraient assez qu'il n'était pas là sans aveu, mais par ordre exprès de la cour de Versailles. Il a donné là-dessus à lire deux lettres du maréchal de Belle-Isle, une datée du 4, l'autre du 26 février dernier, toutes les deux remplies d'éloges de ses talents, de son zèle etc. Dans la première le maréchal lui envoie un passe-port de Sa Majesté Très-Chrétienne en blanc qu'il lui permet en termes exprès de remplir; dans la seconde, beaucoup de protestations combien on mettait de confiance en lui et combien on s'impatientait d'avoir bientôt de ses rapports. Cet émissaire a ajouté qu'on l'avait chargé de tâcher de rétablir dans ce pays-là le crédit des fonds de la France, mais qu'il prévoyait fort bien qu'il ne réussirait pas à rétablir la confiance à cet égard, ce qu'il avait démontré aussi en confidence au comte d'Affry, en lui faisant accroire que c'était l'unique objet de sa mission, quoique ce n'était au fond que le prétexte. Que la Marquise et le maréchal de Belle-Isle lui avaient donné les assurances du consentement de Sa Majesté Très-Chrétienne de venir à La Haye pour sonder lui, Yorke, sur les conditions auxquelles l'Angleterre voudrait faire la paix. Que le comte d'Affry n'était pas du secret, que le Roi, le Dauphin, la Marquise, le maréchal de Belle-Isle, bref toute la cour et la nation désiraient ardemment la paix, à l'exception du duc de Choiseul et du sieur Berryer, dont le premier, à l'exemple de Bernis, travaillait sous main contre la Marquise et la trahissait, qu'aussi il serait mis à côté, si la Marquise était une fois ferme, en procurant la paix dont la France avait le plus grand besoin du monde. Que le sentiment du maréchal et de toutes les honnêtes gens était qu'il fallait tâcher d'éviter absolument de faire une nouvelle cam-
1 Dies war durch Ministerialerlass an Knyphausen, d. d. Magdeburg 25. März, geschehen.