12284. AU MINISTRE D'ÉTAT COMTE DE FINCKENSTEIN A MAGDEBURG.
Quartier général Leubnitz, 24 juillet 1760.
Je vous ai déjà informé par ma lettre d'hier1 de ma situation présente ici et des raisons que j'avais pour suspendre le siège de Dresde. Nonobstant cela, je n'ai point du tout perdu toute espérance de faire quelque chose de bon ici encore. Je ne saurais vous détailler mes idées sur cela; mais je n'ai point renoncé au dessein de porter quelque coup décisif à mes ennemis, avec apparence de bonne réussite. Il est impossible de répondre du succès, mais il faut beaucoup d'idées que j'ai combinées et arrangées au susdit but, et des moyens pour l'entreprendre. Vous devez croire certainement que, pour que cela ne réussisse pas, il n'y aura pas manque ni de mes soins et diligence, ni de ma vigilance, mais uniquement à2 la Fortune nécessaire au succès, qui depuis quelque temps tourne le dos dans presque toutes les occasions. Tenez ainsi, en attendant, votre esprit tout en repos et attendez tranquillement le succès et évènement d'un dessein qui coûte infiniment de peines et de fatigues.
Quant à la négociation entre le sieur de Hellen et le comte d'Affry, comme celui-ci, selon les dernières lettres de Hellen, se tient tout boutonné après son retour à La Haye,3 je vous ordonne d'instruire incessamment le susdit Hellen de se taire absolument encore à ce sujet vis-à-vis du comte d'Affry, et de ne pas s'expliquer sur rien envers lui. Cela ferait un très mauvais effet, si nous témoignions le moindre empressement envers ces gens. Ainsi il faut que Hellen n'ouvre pas la bouche à cet égard. Je joue, moi, à présent ici ce que l'on dit le va banque. Si mes affaires [vont mal] ici, tout sera perdu, et la France ne se souciera pas de nous; si j'ai des succès, nous voilà remontés à cheval de nous-mêmes, et la négociation ira alors avec d'autant plus de facilité. Au surplus, ce qu'il nous faut éviter principalement et avec beaucoup de soin, c'est de ne pas donner le moindre prétexte aux Anglais, ni soupçons d'une négociation séparée de notre part avec la France, faute de quoi nous gâterons absolument nos affaires sans ressource; ce qu'il faut que vous fassiez comprendre également au baron de Knyphausen pour sa direction.
Federic.
P. S.
Après que ma dépêche fut finie et chiffrée, voici une lettre que le sieur d'Edelsheim m'a écrite de Turin au chiffre du sieur de Mackenzie, ministre d'Angleterre, qui est arrivée sous l'adresse du sieur Mitchell, qui vient de me la rendre.4
Je vous avoue que le contenu de cette lettre m'a étrangement sur-
1 Nr. 12280.
2 So.
3 Vergl. Nr. 12282.
4 Vergl. Nr. 12282. 12285.