12231. AU FELD-MARÉCHAL PRINCE FERDINAND DE BRUNSWICK.
Au quartier de Dobritz, 29 juin 1760.
La mauvaise et très critique situation dans laquelle je me trouve, surtout après l'échec que le général Fouqué a essuyé auprès de Landeshut, me force, bon gré mal gré moi, de marcher au secours de la Silésie et de voir, en même temps, si, chemin faisant, je saurais me battre avec l'armée autrichienne qui, sans doute, me suivra. Mes circonstances sont aussi malignes qu'il ne me reste qu'à prendre un parti désespéré, et, si je craignais que vous sauriez peut-être bientôt apprendre de fâcheuses nouvelles de moi, je n'y serais pas trop mal fondé. Je laisse ici, pour maintenir ma position auprès de Meissen et en Saxe, le général Hülsen commandant d'un corps de troupes qui à peine a 14000 hommes complets. Hadik avec l'armée de l'Empire, qui campent auprès de Dresde, ont 23 à 24000 hommes; ainsi jugez ce qui en saura devenir de tout ceci. L'armée russienne se met aussi en marche contre mes États de la Poméranie, [de la Nouvelle-Marche] et de la Silésie, [à la<475>quelle] mon frère s'opposera aussi bien qu'il saura, de sorte qu'il faut bien, selon toutes les apparences, que, dans le courant du mois de juillet, il sera décidé de toutes mes affaires, et, selon toutes apparences, on pourra se représenter à peu près que cela ne saura qu'aller mal, la supériorité de mes ennemis étant trop décidée. En attendant, quand je marcherai d'ici, et dans la situation embrouillée de mes affaires, ma correspondance avec vous restera, sinon interrompue, au moins pour quelques semaines suspendue ; mais je vous serai bien obligé, si entre ce temps il y aura quelque chose à communiquer de votre part ici en Saxe, [que] vous voudrez bien le marquer au général Hülsen, que je laisse dans mon camp de Meissen.
Il est vrai que la face de mes affaires ici est à présent si désespérée qu'il m'est presque impossible d'en pronostiquer quelque chose de bon; mais, comme je n'ai pas été le maître de la corriger, malgré tous les efforts que j'ai faits, je ferai au moins celui encore d'agir avec autant de prudence que de valeur, pour changer le triste sort où je me trouve actuellement; le reste dépendra des évènements dont je ne suis pas le maître.
Federic.
Nach der Ausfertigung im Kriegsarchiv des Königl. Grossen Generalstabs zu Berlin.