<262>

Le Roi approuva mon idée et me dit que je n'avais qu'à la mettre en exécution et me servir de tous les moyens que je croirais convenables pour avancer les intérêts de l'Empereur et faire changer milord Stair, et que je devais en toute occasion travailler pour le service de Sa Majesté Impériale.

Voilà, à peu près, tout ce que le Roi me dit par rapport à cette affaire. Sa Majesté me demanda ensuite ce qu'on disait présentement de nous en Hollande.

Je lui répondis qu'on en était très content, à l'heure qu'il est, mais qu'on ne l'avait pas été autant avant la paix conclue.

Dites-moi, sans me rien cacher, poursuivit-il, si l'on croit que j'ai bien battu l'armée autrichienne à Chotusitz?

Je lui répondis que les gens sensés et les ministres de la République en étaient très convaincus, mais que le public faisait son possible pour rabaisser les avantages que Votre Majesté avait remportés à cette glorieuse bataille; que l'esprit de haine contre les Français, avec lesquels Elle était alors dans une étroite alliance, et la passion qu'on avait pour la reine de Hongrie, en étaient les seules causes; que, sr Votre Majesté voulait se déclarer présentement contre la France, Elle serait plus aimée dans la République qu'aucun autre prince dans l'Europe.

Non, repartit-il, je n'en ferai rien. Mais dites-moi donc, d'où vient cette terrible haine contré la France?

Je lui répondis que les guerres sanglantes que la République avait eues avec cette puissance, en étaient la principale cause.

Comment les ministres autrichiens en usent-ils avec vous? reprit-il.

Je lui répondis : avec beaucoup de politesse, assez de froideur, et peu de confiance.

De quelle façon pense-t-on en général sur mon chapitre? me dit-il encore.

Je lui répondis que je né pouvais pas lui cacher qu'on le regardait comme un prince fort entreprenant; que l'augmentation de ses troupes donnait beaucoup à penser, de même que celles qu'il envoyait dans le Mécklembourg.

Mais, repartit-il, ne me sera-t-il pas permis de faire changer de quartier à mes troupes? J'avais de l'infanterie dans les bailliages que j'ai, comme vous savez, près du Mécklembourg. J'y avais de l'infanterie, et j'y fais mettre 5 escadrons de hussards. Faites comprendre cela aux députés, et que c'est tout de même que lorsque les États font changer de garnison à leurs régiments. Dépeignez moi au reste comme un prince très modéré et qui ne cherche que de vivre en paix avec tout le monde, et faites votre possible pour faire prendre cette idée au public. Vous pourrez même glisser dans vos conversations que j'ai rejeté plusieurs avantages qu'on m'avait proposés, parce que je ne songe qu'à vivre en paix, et que je ne veux plus faire des conquêtes. Vous déclarerez encore au marquis de Fénelon que je n'entrerai absolument