<263>en aucune ligue offensive contre la France, ni pour cette année ni pour la prochaine; qu'en faisant la paix avec la cour de Vienne, j'avais en même temps résolu de m'en tenir exactement à ce dont j'étais convenu par rapport à Juliers et Bergue, et de ne donner les mains à rien contre Sa Majesté Très Chrétienne, quelque avantage qu'on pût m'offrir. Le Roi ajouta que je devais assurer ledit marquis, qu'il m'avait lui-même ordonné de bouche de lui faire ces assurances, et qu'il pouvait les mander à sa cour, qui y pouvait faire fond; que je devais insinuer au même que, preuve de cela, il avait rejeté plusieurs propositions qu'on lui avait faites indirectement par rapport à Juliers et Bergue; que les intrigues du marquis de La Chétardie avaient beaucoup contribué à lui faire prendre la résolution de faire sa paix, qui aurait pu être générale, si l'on avait agi avec plus de vigueur, et porté les choses, selon le plan formé, aux extrémités où elles devaient l'être, mais que, dans l'état où elles étaient, il aurait causé sa ruine sans aider les autres. Il faut encore rejeter toute la faute sur les Saxons, qui effectivement n'ont rien fait, tandis que j'ai donné deux batailles et eu plusieurs actions sanglantes. Il est de mon intérêt d'être bien avee la France; n'est-ce pas? Qu'en dites-vous?
Je lui répondis qu'effectivement il me paraissait qu'il était nécessaire de cultiver l'amitié de cette puissance, d'autant plus qu'il n'était pas apparent que la cour de Vienne oublierait sitôt que Sa Majesté lui avait ôté le plus beau fleuron de sa couronne; que d'un autre côté l'Angleterre, faisant toujours consister l'équilibre de l'Europe dans la puissance de la maison d'Autriche, ne s'opposerait pas à ses avantages et à son agrandissement.
C'est vrai, dit-il; mais d'un autre côté, il faut que la confiance avec la France ne soit que sur les lèvres. Comment vivez-vous avec le marquis de Fénelon?
Je Lui répondis : comme par le passé; que nous nous voyions très souvent, mais que le public et les Anglais n'en étaient pas trop contents et voulaient que j'en agisse avec plus, de froideur avec lui; que l'idée de milord Stair était de lasser la France dans l'incertitude par rapport aux sentiments de Votre Majesté.
Je le crois bien, me répondit-il, mais continuez de vivre avec Fénelon comme par le passé, et ne vous soucier pas de ce que les autres en disent. Après quoi il me demanda ce que je pensais de la marche de Maillebois.
Je lui répondis que je commençais à croire que cette année arriverait à temps, quoique Stair le traitât d'impossibilité et dît que c'était la plus haute folie que la France eût jamais faite.
Je suis de votre sentiment, me répondit le Roi, mais faites comprendre à milord Stair que, si même elle ne peut dégager l'armée à Prague, elle pourra toujours se joindre à celle de Bavière, qui ferait alors un corps très considérable.