889. AU MARÉCHAL DE FRANCE DUC DE BELLE-ISLE A DRESDE.
[Camp de Kuttenberg, 13 juin 1742.]
Monsieur. M. le comte de Mortagne vient de me rendre votre lettre du 10 de ce mois, par laquelle j'ai vu tout ce que vous me mandez tant de la marche des Autrichiens, que du renfort que la cour de Saxe a destiné pour M. le maréchal de Broglie.
Si la cour de Saxe avait voulu suivre mon conseil, toutes leurs troupes seraient depuis longtemps auprès de Prague, et l'ennemi ne se serait peut-être point pris à M. de Broglie, sachant les troupes saxonnes à portée de soutenir vos troupes en Bohême. Mais comme cette cour n'a jamais voulu goûter ce conseil, je crains que tout ce qu'on fait à présent de sa part ne soit pas suffisant ni vienne pas assez tôt pour <198>mettre M. de Broglie dans une meilleure situation. Pour moi, Monsieur, vous savez déjà que ma situation est telle que ce serait vouloir faire l'impossible que de marcher avec mon armée vers Prague, ne trouvant point du tout la subsistance qui me fallait pour y marcher, et comme mon armée n'est pas encore remise des pertes qu'elle a eues dans la bataille sanglante qu'elle vient de donner, je risquerais infiniment de la ruiner tout à fait, si je la voulais mener d'abord à une autre bataille, pour ne point parler des tristes suites, si malheureusement elle eût quelque échec, qui entraînerait absolument la perte de toute la Bohême, et même de toute la Silésie.
A vous parler franchement, Monsieur, je crois qu'on ne s'est pas bien pris à exécuter les opérations qu'on a concertées, et que les choses vont tant à rebours que je n'ai pas bonne opinion de leur réussite; aussi, selon moi, il n'y aura guère d'autre ressource, pour ne pas gâter tout, que de faire la paix à des conditions si bonnes qu'on les pourra avoir. Je suis etc.
Federic.
Nach dem Concept.