934. AU CONSEILLER BARON LE CHAMBRIER A PARIS.
Potsdam, 23 juillet 1742
Bien que je me sois toujours douté que la cour de Saxe n'oublierait rien pour se blanchir à mes dépens, auprès du Cardinal, de ce qu'elle n'a point satisfait à ce qu'elle a prorais à la France, néanmoins je n'aurais pas cru que sa mauvaise foi pourrait aller si loin que de vouloir insinuer au Cardinal, selon ce que vous me mandez dans votre relation du 13 de ce mois, que j'aurais fait connaître à cette cour que je m'étais rendu garant auprès de la cour de Vienne qu'il n'y aurait aucunes troupes saxonnes en Bohême, seize jours après que le roi de Pologne aurait était informé de mon accommodement avec la reine de Hongrie, comme aussi que j'avais fait parler au roi de Pologne d'une manière dure et impérieuse.
J'avoue que j'ai été frappé d'une si insigne malice, et quoique je puisse mépriser des mensonges si grossiers, néanmoins je crois qu'il est nécessaire que vous preniez occasion pour assurer au Cardinal que, quant au premier point, il est absolument faux et controuvé que je me sois rendu garant, vers la reine de Hongrie, qu'il n'y aurait plus de troupes saxonnes en Bohême; que les articles préliminaires de ma paix avec la reine de Hongrie sont à présent rendus publics, et que jamais on n'a stipulé autre chose là-dessus que ce qui est contenu dans l'article 11, c'est à dire qu'on est convenu de comprendre dans ces <236>préliminaires de paix le roi d'Angleterre, la Russie, le roi de Danemark, les États-Généraux, la maison de Wolfenbüttel et le roi de Pologne en qualité d'électeur de Saxe, à condition que dans l'espace de seize jours après la signature de ces préliminaires il retirât ses troupes de l'armée française et de la Bohême.
Vous pouvez assurer au Cardinal de la manière la plus positive que je n'ai point pris d'autres engagements que ce qui est contenu littéralement dans les susdits articles préliminaires.
Quant au second point, le Cardinal ne sait que trop qu'aussi souvent que la cour de France m'a voulu faire parler d'un ton un peu haut avec mes voisins, je l'ai toujours refusé, en remontrant que ce n'était point à moins à moi à parler d'une manière décisive et hautaine à mes voisins. Après ma paix faite, j'ai agi sur le même principe, et je défie la cour de Saxe de pouvoir soutenir que je lui ai fait parler sur un ton impérieux.
Ce n'est point pour me disculper auprès du Cardinal que je vous mande ceci, mais seulement pour lui faire voir la mauvaise foi et la duplicité de la cour de Saxe, qui, en même temps qu'elle cherche avec empressement mon amitié, tâche de me noircir si indignement auprès de la cour de France. Vous ne manquerez point d'expliquer tout cela au Cardinal d'une manière convenable, et j'attendrai votre rapport quelle impression cela aura fait sur l'esprit du Cardinal.
Federic.
Nach dem Concept.