1002. INSTRUCTION POUR LE LIEUTENANT-GÉNÉRAL COMTEDE DOHNA, ALLANT A LA COUR DE LA REINE DE HONGRIEET DE BOHÊME EN QUALITÉ DE MINISTREPLÉNIPOTENTIAIRE.283-1
Berlin, 28 octobre 1742.
1. Weisungen für den dem Hofkanzler Graf Ulfeld abzustattenden Antrittsbesuch : . . . . „Le comte de Dohna assurera ce ministre que le principal but de son envoi à la cour de Vienne est de travailler de tout son possible à cultiver et resserrer de plus en plus l'amitié, l'union et la bonne harmonie qui venaient d'être rétablies si heureusement . . . Le comte de Dohna fera un compliment poli et convenable de la part du Roi à ce ministre, en l'assurant de la considération et de toute l'estime de Sa Majesté, et qu'elle le regarde comme l'instrument heureux dont la providence s'est servi pour remettre sur l'ancien pied l'ancienne amitié“ etc.
2. „L'intention du Roi étant283-2 que le comte de Dohna prenne une audience publique de la Reine, il aura soin qu'on la lui accorde avec les mêmes marques de distinction et les mêmes honneurs que cela se pratique à l'égard des autres ministres de têtes couronnées, révêtus de son caractère, dans de pareilles audiences.“
[Artikel 3 — 8 enthalten Weisungen fur die Empfangsaudienzen und für die erste Begegnung mit den Ministern der Königin und den Vertretern der auswärtigen Höfe.]. „Le comte de Dohna demandera pour son personnel l'honneur de la protection et de l'assistance du Grand-Duc dans toutes les affaires dont il se trouverait chargé pendantson séjour de Vienne“ ...... „Au secrétaire d'État, le baron de Barten-stein, il dira également quelque chose de poli et de gracieux de ma part.“
9. „L'objet principal de l'envoi du comte de Dohna à la cour de Vienne consiste à consolider de plus en plus la bonne amitié, union et harmonie qui a été rétablie entre le Roi et la reine de Hongrie et de Bohême par le traité des préliminaires de paix, signé à Breslau le 11 de juin de la présente année, et par le traité définitif de paix, conclu et signé à Berlin le 28 de juillet de l'année courante, dont le comte de Dohna trouvera ci-joints quelques exemplaires en français et en allemand pour son information. Tous ses soins doivent se tourner à tout ce qui pourra tendre à affermir cette paix, et à établir sur un pied solide et stable la présente bonne harmonie et amitié entre les deux États, et à déraciner <284>tout sujet de méfiance, d'aigreur, de jalousie et d'éloignement secret entre les deux cours. C'est pourquoi le comte de Donna ne laissera échapper aucune occasion dans ses entretiens, soit avec la Reine, le duc de Lorraine ou le ministère de la cour de Vienne, pour les persuader de la sincérité des sentiments et des dispositions les plus favorables du Roi, non seulement pour observer religieusement la paix qu'il vient de conclure avec la Reine, mais aussi pour entretenir avec cette princesse et toute sa maison une bonne correspondance, étroite amitié et solide harmonie, Sa Majesté étant persuadée que l'intérêt commun des deux maisons, l'équilibre de l'Europe et le bien et le salut de l'Allemagne en dépendent en grande partie; aussi le Roi se flatte qu'on en pensera de même à Vienne, et qu'on agira avec la même sincérité et confiance comme Sa Majesté le fera de son côté; et quoiqu'elle gardera une exacte neutralité entre, les parties belligérantes, ainsi qu'elle l'a fait scrupuleusement depuis la paix, cependant elle se fera un plaisir de contribuer, en tout ce qui sera en son pouvoir, à l'avantage et à l'avancement des intérêts de la reine de Hongrie, tout comme le Roi a instruit et chargé expressément tous ses ministres aux cours étrangères de concourir à tout ce qui se pourra, sans blesser les lois de la neutralité, pour faire plaisir à la cour de Vienne et contribuer quelque chose à sa satisfaction. Et que le Roi serait charmé de pouvoir aider à travailler par ses bons offices au rétablissement de la paix générale, surtout en Allemagne, sur un pied convenable et agréable à toutes les parties qui y sont intéressées.“
10. „Pour ce qui regarde l'exécution de la paix conclue entre le Roi et la reine de Hongrie, Sa Majesté apportera de son côté toutes les facilités imaginables pour ce qui pourrait rester encore à ajuster, soit par rapport aux limites, soit pour ce qui regarde le règlement de commerce. En quoi le Roi se flatte d'un entier réciproque de la part de la cour de Vienne.“
11. „Et comme le comte de Dohna verra par le traité définitif de paix qu'on a stipulé, par l'article 10, que la reine de Hongrie et de Bohême s'est engagée de faire restituer et remettre fidèlement au Roi toutes les archives, papiers, documents, chartes etc. qui regardent les États et provinces, cédés par la paix au Roi, et que cette restitution ne s'est pas encore faite, quoiqu'on y ait insisté déjà plusieurs fois, surtout pour qu'on commence par remettre incessamment les cadastres de contributions des différentes provinces, cédées au Roi, comme aussi les actes judiciaires, les instruments déposés, et généralement tout ce qui peut intéresser les procès des particuliers, qui souffrent extrêmement par un plus long délai de cette restitution, si nécessaire pour l'administration de la justice, le comte de Dohna fera là-dessus des remontrances sérieuses au comte d'Ulfeld et aux autres ministres, chargés de ces sortes d'affaires, pour qu'on procède incessamment à cette restitution, si elle ne s'est pas faite encore, et qu'on achève à faire <285>remettre les archives qui regardent les pays de la Silésie et de Glatz, cédés au Roi, selon la teneur du susdit article 10 du traité définitif de paix. Le comte de Dohna donnera en même temps les promesses les plus positives que Sa Majesté fera restituer fidèlement de son côté tout ce qui pourrait encore se trouver d'archives et de papiers publics ou particuliers en Silésie ou dans le comté de Glatz et appartenir aux provinces et États que la Reine a gardés, et qu'on n'en retiendra pas une feuille, mais qu'on en fera une recherche partout, et qu'on prie même de vouloir indiquer ce qui pourrait regarder ces archives et papiers tant publics que particuliers, pour que Sa Majesté les puisse faire rendre fidèlement, à mesure qu'on en fera, autant de la part de la cour de Vienne.“
12. „L'article séparé ci-joint du traité définitif de paix fera voir au comte de Dohna de quoi on est convenu préalablement par rapport à une convention à faire, avec le temps, à l'égard du payement réciproque des dettes des particuliers de l'un et de l'autre État. Et comme on a renvoyé cette affaire à un temps plus convenable, et qu'elle est d'une longue et difficile discussion, le comte de Dohna n'en fera point mention encore; mais, quand on lui en devrait parler, il répondra simplement qu'il ne doute point qu'on n'en convienne, avec le temps, d'une manière juste et équitable, mais que jusqu'ici il n'en a point d'instruction et d'ordre encore, et qu'il faut prendre premièrement connaissance des prétentions que les sujets du Roi avaient à la charge de la cour de Vienne, pour voir de quelle manière on pourra ajuster avec le temps les prétentions réciproques de part et d'autre.“
13. „Le comte de Dohna tâchera de pénétrer, autant que cela se peut de bonne grâce, avec tout le soin imaginable, mais sans qu'il en paraisse, quel est le véritable système d'à présent de la cour de Vienne, par rapport à la situation des affaires en Europe en général et surtout à celle où elle se trouve à l'occasion de la terrible guerre qu'elle a sur les bras; à quelles conditions elle voudra faire la paix, soit de concert avec l'Angleterre et l'Empereur, indépendamment de la France, soit avec les deux derniers sans approbation et la concurrence de l'Angleterre; comment la Reine est contente de la dernière, qu'elle ressource elle espère d'en tirer, quels moyens elle voudra employer pour délivrer ses pays héréditaires des armées françaises, et où on voudra porter la guerre, en cas qu'on parvienne à chasser les Français de la Bohême; à quels sacrifices la Reine voudra se résoudre en faveur de l'Empereur, ou bien en celle de l'Espagne en Italie, pour faire plaisir au roi d'Angleterre et pour faciliter sa paix avec l'Espagne; quelle vue on pourrait avoir à Vienne pour la dignité d'un roi des Romains, soit dans la personne du grand-duc de Lorraine, soit dans celle de l'Archi-Duc son fils; de quels moyens on croit pouvoir se servir à la cour de Vienne pour y induire l'Empereur, et pour gagner le collége électoral, afin que <286>de faciliter et faire réussir avec le temps un pareil dessein, si tant il y a qu'on y songe véritablement à Vienne, à ce que l'on prétend.“
14. „Le comte de Dohna ne sera pas moins attentif à la véritable disposition de la reine de Hongrie envers le Roi, et si son intention est sincère d'observer religieusement la paix, conclue avec Sa Majesté, ou si on ne tâche qu'à gagner du temps et à avoir les coudes franches, pour rentrer un jour dans les provinces perdues par cette paix; si la cour de Vienne entretient encore des correspondances et des intelligences secrètes en Silésie; s'il y en a, de ces pays cédés au Roi, qui s'adressent sous main à la cour de Vienne, ou qui l'informent de ce qui s'y passe maintenant; quels arrangements on prend à Vienne pour les provinces de la Reine qui sont limitrophes à celles qu'on a cédées au Roi; si l'on songe d'y faire des places fortes, d'y établir des magasins, d'y envoyer un plus grand nombre de troupes, de combien elles sont, et généralement tous les mouvements qu'on pourra leur faire, tant pour les envoyer actuellement sur les frontières des États cédés par la paix, que pour les tenir prêtes et à portée dans le voisinage. Le comte de Dohna ne saurait entrer dans un trop grand détail sur tout cela pour remplir exactement les intentions du Roi et pour lui mander de temps en temps avec précision, jusqu'aux moindres circonstances, tout ce qui peut y avoir rapport, afin qu'il ne se passe rien à cet égard dont Sa Majesté ne soit informée à temps,“
15. „Les négociations des ministres d'Angleterre, de Saxe et de Russie à Vienne doivent encore faire un objet très important del'attention du comte de Dohna, et il doit s'informer soigneusement de tout ce qui se négocie à Vienne avec les cours ci-dessus nommées; sur quel pied on est avec chacune d'elles, quelles liaisons on a contractées ou que Ton voudra encore prendre avec toutes ces puissances.“ .
„L'alliance étroite entre les cours de Vienne et de Londres est connue de tout le monde, aussi bien que les grandes obligations que la première a à celle d'Angleterre, pour tous les efforts que celle-ci a faits en faveur, de la Reine, quoique le motif principal en soit du côté de l'Angleterre de réduire la France à un état de médiocrité et à la mettre au niveau des autres puissances, comme aussi pour obtenir par ce moyen une paix avantageuse avec l'Espagne. Et il y a beaucoup d'apparence que, si l'Angleterre trouve moyen de l'obtenir et d'affaiblir par là la France, elle se ralentira considérablement par rapport à la reine de Hongrie et sera peut-être la première, alors, à lui conseiller de faire sa paix quovis modo. Reste donc à savoir si on ne craint point un pareil événement à Vienne, et si on voudra hasarder à s'y exposer, en ne faisant jamais de paix sans la concurrence et l'approbation de l'Angleterre.“
„Quant à la cour de Russie, celle de Vienne s'est toujours flattée qu'elle en tirerait tôt ou tard dés secours réels, surtout la Suède étant réduite à accepter la paix telle que la Russie voudra la lui accorder. Le <287>ministère de Russie d'à présent a paru jusqu'ici très favorablement disposé pour les intérêts de la Reine, et même le ministre russien à Vienne, le sieur Lantschinski, est autrichien jusqu'à la moëlle des os. Mais l'impératrice de Russie ne pense pas de même et a marqué beaucoup de froideur et même de l'éloignement pour tout ce qui regarde la cour de Vienne. Cependant, comme le ministère russien, s'il se, conserve, fera facilement prendre avec le temps à sa souveraine le pli qu'il souhaite, il ne faut pas douter que la cour de Vienne ne fasse tous les efforts imaginables pour obtenir, en cas que la guerre continue de durer, des secours réels de la Russie, ou pour la porter au moins de s'unir étroitement avec elle, sur le même pied que la maison d'Autriche l'a été autrefois avec cette puissance. C'est à quoi le comte de Dohna doit être extrêmement attentif.“
„La cour de Saxe, nouvellement réconciliée avec la Reine, fait toutes les démarches imaginables, à ce qu'on assure, pour prendre des liaisons très étroites avec cette princesse et pour entrer dans toutes ses vues, soit pour se ménager par là quelque cession en cas d'assistance réelle, soit pour trouver dans la cour de Vienne un puissant appui contre les puissances qui causent le plus d'ombrage et de jalousie à la Saxe. Et comme le Roi pourrait bien être à la tête de celles-là, il ne faut pas douter que l'intention de la Saxe ne soit pour barrer le Roi, de concert avec la reine de Hongrie, en tout ce qu'elle pourra, se sentant trop faible pour subsister seule, sans une alliance aussi forte que serait celle de cette princesse, dès quelle aura la paix. Indépendamment dé cela, la reine de Pologne, le père Guarini, et plusieurs autres à la cour de Dresde, sont des partisans outrés de la cour de Vienne. Le comte de Bunau, ministre de Saxe à Vienne, ne l'est pas moins : ainsi, le comte de Dohna fera bien de tâcher d'approfondir, autant qu'il est possible, jusqu'où les nouvelles liaisons que ces deux cours travaillent de contracter, pourraient aller.“
„La France paraît, à la vérité, être à présent l'objet de l'animosité et de la haine la plus marquée de la cour de Vienne. Mais, comme cela ne décide pas toujours pour l'avenir, et qu'on a vu arriver des révolutions si surprenantes dans le système des affaires de l'Europe que les puissances qui ont été les plus acharnées, les unes contre les autres, sont celles qui s'unissent tout d'un coup le plus étroitement, quand elles y trouvent leur intérêt, ainsi que cela est arrivé déjà entre les maisons d'Autriche et de Bourbon, il n'est pas impossible qu'on ne voie faire la même chose encore dans la guerre présente, et que la France, pour se tirer d'affaire et procurer même des avantages à l'Empereur, ne fasse envisager à la Reine de lui faire rattraper par son assistance ce qu'elle pourra avoir sacrifié ailleurs. C'est un article de la plus grande importance, et qui mérite bien que le comte de Dohna y porte toute son attention, pour informer le Roi de tout ce qui pourrait arriver à cet égard.“
<288>„Par rapport aux autres négociations qui pourraient être sur le tapis à Vienne avec d'autres cours étrangères, le comte de Dohna se donnera plus ou moins de peine à déterrer ce qui s'y passe, à mesure qu'elles auront du rapport aux intérêts du Roi, et d'en informer Sa Majesté.“
16. „Le comte de Dohna n'oubliera pas d'envoyer au Roi, après la paix que la Reine pourra faire avec ses ennemis d'à présent, un état détaillé des troupes de la Reine, le pied sur lequel on les mettra, et la force de chaque régiment.“ 288-1
Artikel 16 — 20 enthalten den Befehl, über die innere Lage des Landes Informationen einzuziehen, sowie Weisungen in Betreff des Gesandtschaftsarchivs und für den geschäftlichen Verkehr des Gesandtenmit dem Könige und dem Ministerium.
Federic.
H. Comte de Podewils.
Nach dem Concept.
283-1 Podewils berichtet, Berlin 27. October, bei Vorlegung des Concepts zu dieser Instruction : „Je me flatte d'avoir rencontré en tout ce que Votre Majesté m'a ordonné de bouche d'y insérer.“ Desgl. 30. October: „J'ai fait expédier de nouveau l'instruction ci-jointe, après y avoir fait les changements que Votre Majesté m'a ordonnés.“
283-2 In dem ursprünglischen Entwurf der Instraction steht „L'intention du Roi n'étant point“ etc. Der König schreibt eigenhändig an den Rand : „Non, il doit prendre une audience publique.“
288-1 Der Artikel 16 ist zu dem ursprünglichen Concept gemäss einer eigenhändigen Randbemerkung des Königs hinzugefügt.