1252. AU CONSEILLER PRIVÉ DE GUERRE DE KLINGGRÆFFEN A FRANCFORT SUR-LE-MAIN.

Berlin, 12 novembre 1743.

Quant aux instances qui vous ont été faites par l'Empereur et par le maréchal de Törring, à ce que je vois par un des post-scriptums de votre dépêche du 2 de ce mois, pour me faire expliquer plus précisément sur la diversion qu'on pourrait attendre de ma part en faveur de Sa Majesté Impériale, je vous ai déjà suffisamment instruit de mes intentions et idées sur cet article, par mes ordres précédents, auxquels je me réfère simplement.

Vous n'ignorez pas d'ailleurs que j'ai approuvé le projet du traité d'association que l'Empereur m'a fait communiquer par le baron de Spon; et pourvu que l'Empereur poursuive ce plan et l'amène à sa perfection, je le tiens suffisant pour parvenir, en son temps, au but que l'on se propose.

D'entrer dans de nouveaux engagements avec la France, et de conclure avec elle une nouvelle convention relative aux affaires de <465>l'Empereur, c'est ce que, par plusieurs raisons, je ne trouve nullement convenable à mes intérêts; et une nouvelle garantie de cette couronne pour la Silésie n'est pas un objet qui puisse me faire changer de sentiment. La France m'a déjà garanti formellement cette province, par le traité d'alliance de l'an 1741, et cd n'est que contre cette garantie que j'ai renoncé aux droits de ma maison sur les duchés de Juliers et de Bergue. Une nouvelle garantie de la France ne me donnera pas plus de sûreté pour mes acquisitions que ne fait celle qui subsiste actuellement, et laquelle cette couronne est d'autant plus intéressée de remplir, le cas existant, qu'au défaut de cela ma renonciation aux duchés de Juliers et de Bergue deviendrait nulle, et les droits de ma maison sur ces provinces resteraient dans toute leur vigueur.

P. S.

Il ne me semble pas que les appréhensions que l'Empereur vous a témoignées, selon un de vos post-scriptums du 2 courant, au sujet de la course du baxon de Palm en diverses cours de i'Empire,465-1 soient tant fondées. J'ai bien de la peine à m'imaginer que la cour de Vienne se détermine, avant la fin de la guerre, de reconnaître l'Empereur en cette qualité. Cela répugne trop à son système et l'obligerait à des égards pour ce prince qui ne conviennent pas à ses vues. Quand même, contre toute attente, elle s'y résoudrait, elle se trouverait encore bien éloignée de son grand but, qui est sans doute l'élection d'un roi des Romains en faveur du duc de Lorraine, but qu'elle ne saurait obtenir ni n'osera même découvrir, sans être assurée de la pluralité des suffrages dans le collége électoral. L'Empereur peut compter sur le mien et sur celui de la cour palatine; et, quelque froideur qui règne entre lui et l'électeur de Cologne, je ne saurais me persuader que celui-ci se laisse induire à faire à sa propre maison un tort aussi irréparable que de donner les mains à l'élection dont il s'agit. Pour ce qui est de la Saxe, comme l'Empereur entretient constamment des liaisons avec elle, j'espère qu'il trouvera aisément moyen de la retenir dans ses intérêts, d'autant plus que, par l'élevation du duc de Lorraine, elle mettrait pour jamais un obstacle insurmontable à la poursuite de ses prétentions sur les États de la succession d'Autriche. De sorte que, quand même l'affaire serait <466>proposée, et que les électeurs de Mayence, de Trêves et de Brunswick l'appuyassent, la pluralité des suffrages ne laisserait pas de se trouver du côté opposé.

Quant à l'idée de l'Empereur d'établir un ministre de Bohême à la Diète, il n'y a nulle apparence que, dans la situation présente, cette assemblée ni même le collége électoral y donnent les mains ou reconnaissent un tel ministre; d'autant plus que, dans le temps que la conjoncture paraissait infiniment plus favorable, pour l'Empereur, tout ce qu'on a pu obtenir à cet égard, c'est la suspension de la voix de Bohême, tout le collége électoral n'ayant point trouvé à propos alors de donner dans le diplome d'élection à l'Empereur les nouveaux titres qu'il avait pris. De sorte que je ne saurais conseiller à l'Empereur d'entamer cette matière. Moi-même, je ne pourrais voter à ce sujet en faveur de l'Empereur, sans contrevenir ouvertement au traité de paix que j'ai conclu avec la reine de Hongrie, y ayant reconnu son titre de Bohême, ce que vous pourrez bien insinuer de bonne manière à Sa Majesté Impériale, au cas qu'elle recommence à faire mention de ce projet.

Federic.

H. Comte de Podewils. C. W. Borcke.

Nach dem Concept. Zu Grunde lîegt eine von dem Könige dem Grafen Podewils persönlich ertheilte Weisung.



465-1 Klinggräffen berichtet 29. October: „Le comte de Königsfeld m'a communiqué des lettres par lesquelles on lui donne avis que le baron de Palm, ministre de la reine de Hongrie à Ratisbonne, partait de Vienne pour les cours de Mayence, Trêves, Bonn, et peut-être Mannheim, pour tâcher de les engager qu'il fût admis à la Diète, sous prétexte que le baron de Plettenberg et lui avaient été reconnus pour tels après la mort de feu l'Empereur.“ Desgl. 2. November: „L'Empereur craint que, si l'on oppose à ce ministre contre son admission à la Diète que sa souveraine ne reconnaît ni l'Empereur ni la Diète, et que, par conséquent, il y aurait de la contradiction à l'admettre, il n'ait des ordres en poche qui l'autorisent tout d'un coup à reconnaître l'Empereur et la Diète et de passer cet obstacle, pour parvenir à son but, qui serait l'élection d'un roi des Romains.“ Vergl. unten S. 490 Anm. 1.