12466. AU MINISTRE D'ÉTAT COMTE DE FINCKENSTEIN A MAGDEBURG.
Auprès de Strehla, 6 novembre [1760].
Vous me ferez la justice de convenir que j'ai fait cette campagne ce qui m'était humainement possible pour soutenir les affaires. Bien des malheurs nous sont arrivés qu'il n'était pas en mon pouvoir de prévenir. Je me suis adressé ici à mon principal ennemi, et quoique la perte des Autrichiens n'aille qu'entre 18 et 20000 hommes, vous pouvez être sûr que tous leurs projets sont dérangés, que les Russes s'en iront en Pologne et que nous gagnerons tout l'hiver.
Si vous voulez savoir ce que je pense de l'avenir, vous devez le<52> deviner, sans que je vous le dise. Souvenez-vous de tout ce que je vous ai écrit l'hiver passé. Je n'ai point changé de sentiment, et vous devez regarder ce qui s'est passé le 3, comme la dernière étincelle d'un feu qui s'éteint. Cocceji, que j'envoie en Angleterre avec une lettre au Roi,52-1 pourra vous mettre au fait de bien des détails, si vous êtes curieux de les savoir. Votre frère n'est point blessé, il a eu un cheval de tué dans une rude charge de cavalerie et a été fait prisonnier.52-2
Vous verrez par ma relation52-3 la vérité de ce qui s'est passé, à l'exception de quelques détails trop humiliants pour la gloire des troupes. Enfin, voilà du novembre à juin sept mois de gagnés; ce sera tout le fruit des travaux, des dangers et des peines infinies que nous a coûté cette rude et cruelle campagne. Cependant, vous devez savoir que Daun avait ordre de livrer bataille, et que, si malheur n'était arrivé, les Russes auraient avancé jusqu'à l'Elbe et les Autrichiens nous auraient rejetés au delà de la Saale; regardons donc le jour du 3 comme un évènement qui plutôt nous a préservés de grands malheurs, que comme un triomphe qui nous ouvre le chemin des conquêtes et des plus brillants avantages.
Adieu, mon cher comte, il faut que je travaille à ma besogne et que je prépare nos marches, nos cantonnements et toutes les dispositions qu'il faut faire pour accélérer la clôture de cette terrible campagne.
Federic.
Nach der Ausfertigung. Eigenhändig.
52-1 Nr. 12461.
52-2 Vergl. S. 47.
52-3 Nr. 12467.