12619. AU CONSEILLER PRIVÉ DE LÉGATION BARON DE KNYPHAUSEN A LONDRES.
Leipzig, 3 janvier 1761.
Vos dépêches du 19 de décembre m'ont été bien remises, et j'ai été bien aise d'apprendre que le ministère britannique n'ait pris aucune résolution précipitée au sujet du renouvellement de la déclaration faite l'hiver dernier.175-3 Je me flatte que les ordres que je vous ai adressés du depuis, vous seront parvenus à l'heure qu'il est, et que vous aurez trouvé moyen de changer cette mesure en conformité des instructions que je vous ai données.
Il faut que je vous avertisse, en attendant, que, le sieur Mitchell m'ayant pressé de m'expliquer sur le nombre des troupes que je souhaiterais de garder à ma disposition dans le cas d'une paix séparée entre l'Angleterre et la France, ainsi que sur le subside extraordinaire qu'il me faudrait pour rendre ces troupes mobiles, je lui ai répondu que c'était à Sa Majesté Britannique, qui m'avait promis de la manière la plus amiable de me laisser, dans le cas du troisième article du précis,175-4 toutes les troupes allemandes de l'armée alliée, à en déterminer le nombre,<176> que je n'aimais pas d'être à charge à mes alliés, mais qu'il était naturel aussi que je songeasse à ma sûreté, et que j'espérais par conséquent que la cour d'Angleterre me laisserait un corps d'armée assez considérable pour pouvoir me procurer un soulagement réel pour faire la convenance du duc de Brunswick et du landgrave de Hesse, et rendre ce secours assez efficace pour faire impression sur les cours de Vienne et de Russie et entraîner une pacification générale. J'ai ajouté que, dès que je saurais au juste la force de l'armée auxiliaire qu'on veut me laisser, et le nombre des troupes qui doivent la composer, tant infanterie que cavalerie et artillerie, je ne manquerais pas de m'expliquer alors sur la somme nécessaire pour leur entretien; ce qu'il m'était impossible de déterminer jusqu'à présent.
Voilà la réponse que j'ai donnée au sieur Mitchell;176-1 mais à vous, je vous dirai que le moins que je puisse exiger, est une armée de 40 000 hommes. Si vous pouvez en obtenir davantage et faire monter ce corps jusqu'à 45 ou 50 000, la chose n'en serait que mieux, puisque j'aurai toujours à faire aux deux cours impériales et à l'armée de l'Empire; et comme l'on m'a promis d'abord toutes les troupes allemandes que l'Angleterre paie actuellement à raison de 65000 hommes et audelà, je devrais croire que cela ne souffrirait pas de grandes difficultés. C'est à vous qui êtes sur les lieux, à juger de ce qui peut se faire, sans faire crier la nation et sans me faire perdre le bénéfice de cette paix séparée qui ne consistera, pour ainsi dire, que dans ce seul secours; et quant au subside extraordinaire et indépendant de celui que je retire actuellement, je souhaiterais aussi que vous puissiez me marquer jusqu'où vous croyez que je puisse porter cette demande, en vous procurant des notions sûres de ce qu'il en coûte à l'Angleterre pour l'entretien d'un corps pareil à celui qu'on me destine, ainsi que pour la construction des magasins nécessaires.
Pour vous faciliter cette supputation, je vous envoie les notes ci-jointes de ce qu'il en coûte à peu près pour un nombre pareil de troupes, selon l'état établi dans mon armée. Le tout y a été mis au plus bas prix et différera par conséquent à bien des égards de la somme considérable destinée jusqu'ici pour l'entretien des troupes allemandes de Sa Majesté Britannique, et j'y ai fait joindre toutes les comptes détaillés qui servent à expliquer la susdite supputation dans toutes ses parties, afin de convaincre par là, les circonstances le requérant, de la justesse<177> du calcul et de la probité et du désintéressement avec lequel je [veux] rondement agir avec eux. Je ne prétends pas non plus obliger l'Angleterre aux dépenses exorbitantes que cet entretien lui a coûté jusqu'à présent, mais je me crois en droit de demander ce qui est absolument nécessaire, et je me flatte que vous pourrez me donner sur ce sujet les éclaircissements nécessaires pour ne préjudicier ni aux intérêts de la cour de Londres ni aux miens.
Je vous recommande de peser mûrement cette affaire et de m'en faire votre rapport le plus tôt possible.
Federic.
Selon177-1 l'état prussien l'entretien d'un corps de 40000 combattants qui fait la campagne, demande à peu près par an :
1. Pour la solde des troupes | 2988000 écus d'Allemagne |
2. Pour la farine nécessaire du pain du soldat et du train | 613200 " |
3. Pour les fourrages dans les mois où l'on ne peut pas fourrager, ce qui est à peu près depuis celui de janvier jusqu'à la fin de juin incl. | 1746817 " 12 gros |
4. Pour la viande du soldat en campagne | 153675 " 18 " |
5. Pour la gratification des quartiers d'hiver, afin que les officiers puissent se remettre en campagne | 254400 " — " |
Note. Au cas que l'on se trouve en pays ennemi, cette dépense se ménage. | |
6. Pour la réparation de la boulangerie et de son train Pour la réparation de l'artillerie | 187000 " — " |
l'un portant l'autre par l'année | |
Total | 5943093 écus 6 gros. |
Il faut177-2 se souvenir que, le subside aux princes qui donnent leurs troupes, n'est pas compris dans cette somme.
On peut aisément savoir à combien revient un plus grand ou un moindre nombre de troupes; s'entend si, par exemple, l'on suppose 35000, on déduit 1/8 de la dépense; si l'on en suppose 30000, on en déduit le 1/4 p.p.
<178>Si toute la campagne se fait en pays ennemi, il y a beaucoup à rabattre, tant pour les fourrages que pour les quartiers d'hiver.
Das Hauptschreiben nach dem Concept; die Beilage nach der mit einem Ministerialrescript d. d. Leipzig 3. Januar an Knyphausen übersandten Ausfertigung.
175-3 Vergl. Nr. 12617.
175-4 „Précis de la dépêche des ministres de Prusse“ , d. d. London 12. December 1760 : „Enfin que, comme au défaut de ces mesures (Wiederholung einer englisch-preussischen Friedenserklärung, Gewinnung Russlands) il pourrait arriver 3° qu'une paix particulière entre l'Angleterre et la France se trouvât praticable, . . on voudrait savoir avec précision à quelles conditions, Sire, vous désireriez un pareil accommodement et quels secours pécuniaires, y compris le subside actuel, pourraient vous suffire pour vous aider à entretenir les troupes allemandes qui pourraient passer à votre solde.“ Vergl. Schäfer a. a. O. Bd. II. Thl. 2, S. 172.
176-1 Eichel schreibt, Leipzig 1. Januar, an den Minister Finckenstein in Leipzig „Es ist mir ohnmöglich gewesen, des Königs Majestät etwas wegen des Herrn Mitchell zu erinnern, weil Höchstdieselbe Sich ganz kurz expedireten und mir gar nicht disponiret zu sein schienen, von Affaires zu sprechen, es sei nun, dass Sie Sich etwas indisponiret finden oder aber über die vielen Neujahresgratulationsschreiben unzufrieden waren oder auch das Regenwetter etwas dazu contribuirete, indem dadurch des Prinz Ferdinand Operationes immer mehr und mehr trainiret werden. Es kann alles dreies zusammen sein.“
177-1 Der folgenden Aufstellung liegen ein eigenhändiger französischer Entwurf des Königs und ein von Eichel geschriebener deutscher zu Grunde. In letzterem geht der eigentlichen Berechnung noch der Satz voran: „Es kommt jetzo darauf an, dass das englische Ministère sich explicire, ob es ein Corps d'armée von 40000 Combattanten von denen teutschen Truppen der alliirten Armee auf den Fuss des englischen Soldes oder aber auf den preussischen Fuss unterhalten lassen wolle.“
177-2 Von „il faut“ bis zum Schlusse fast wörtlich nach dem eigenhändigen Entwurf des Königs.