<330>saxonnes en Bohême la cour de Saxe n'a cherché qu'à se frotter ouvertement à moi et à assouvir la rage, la haine et la jalousie qu'elle a tenues contre moi et ma maison depuis bien du temps; après qu'elle a fait ce premier pas, qu'est ce qu'elle ne met pas en œuvre pour révolter tout le monde contre moi? Et quels préparatifs ne fait-elle pas sous main afin de m'assaillir avec succès et de me prévenir en cela, s'il est possible?
J'espère que mes ministres du département des affaires étrangères ne vous auront pas laissé ignorer combien d'insinuations les plus malicieuses les ministres saxons aux cours étrangères ont faites contre moi. Vous savez ce qui s'est passé sur cet article en Russie, et combien de projets préjudiciables à mes intérêts ils y ont proposés ; vous savez de même avec quelle chaleur ils ont travaillé à faire constater la quadruple alliance à vous assez connue. Que font-ils autre chose à présent en. Pologne, sinon que de tâcher d'animer la nation polonaise contre moi par toutes sortes d'insinuations? Et s'occupent-ils à autre chose pendant la diète présente de Grodno qu'à disposer la République à une augmentation des troupes, et qu'à la faire entrer en alliance avec la reine de Hongrie, uniquement dans le dessein de m'envoyer les Polonais sur le corps? Quel vilain tour n'ont-ils pas tâché de jouer à mes ministres à Grodno, dont, j'espère, vous serez déjà informé! En Saxe, on travaille actuellement à faire des amas de magasins pour un grand corps d'armée à Wittenberg, à Torgau et dans la Lusace; on répare les fortifications, on fait des amas d'artillerie, on veut augmenter les troupes par des recrues qu'on tâche de faire sous main en Pologne, et je suis assez bien informé que, pour en venir d'autant plutôt à bout, on a sollicité plusieurs grands de Pologne de leur céder les gardes que ceux-ci ont sur pied. A Fürstenberg, ville saxonne dans la Lusace et joignante à l'Oder, ils ont tout récemment fait construire un pont, où de mémoire d'homme il n'en a pas été, qu'ils font garder d'un détachement de 500 hommes, duquel pont ils ne peuvent faire autre usage que de faire venir clandestinement, et sans me requérir pour le passage, des troupes de Pologne vers la Saxe. Il y a peu de semaines qu'on s'est saisi dans mon pays d'un nombre considérable de caisses qu'on voulait envoyer de Fürstenberg en Pologne, et auxquelles le ministre Hennicke à Dresde avait joint un passe-port signé de sa main, comme s'il n'y avait dedans que des meubles et des fourneaux appartenants au chambellan d'Unruh; néanmoins, comme mes douaniers en ont pris soupçon et ont visité ces caisses, on n'a trouvé que des pistolets, des carabins et des sabres.
Par toutes ces manœuvres, il est aisément à juger ce que j'ai à attendre des Saxons, et comme il m'est donc impossible de me laisser imposer plus longtemps si grossièrement des Saxons et de leur laisser tout le temps pour me prévenir, il ne pourra guère manquer, si cela continue de la manière qu'il a commencé, que je ne sois obligé, à la fin, de me défendre contre leurs entreprises et de dégainer avec eux le printemps qui vient.