1532. AU MINISTRE D'ÉTAT BARON DE MARDEFELD A MOSCOU.

Potsdam, 7 août 1744.

Vos relations du 12 et du 23 du mois de juillet passé m'ont été bien rendues.

De tout ce que vous me mandez de l'état embrouillé et incertain, là où vous êtes, je tire pourtant la conséquence que je n'aurai pas trop à craindre que l'Impératrice se laisse engager de prendre parti contre moi, et le raisonnement que vous faites dans le post-scriptum de votre dernière relation, est si sensé qu'il ne laisse pas de me confirmer dans la résolution que j'ai prise de faire sans plus de délai ma levée du bouclier, pour ne pas laisser plus longtemps fouler aux pieds l'autorité impériale et opprimer les États de l'Empire, uniquement pour assouvir l'ambition démesurée de la maison d'Autriche et ses vastes desseins, qui ne manqueraient pas de devenir fatals tant à moi qu'à l'Empire et même à toute l'Europe, si l'on ne tâchait d'y mettre des bornes. Aussi suis-je persuadé que, mes intentions n'étant autres que de faire rendre à l'Empereur ce qui lui faut et de calmer les troubles qui déchirent l'Empire, le bon Dieu bénira mes desseins.

De votre part, vous continuerez de travailler de votre mieux pour entretenir l'Impératrice dans les sentiments amiables qu'elle m'a témoignés jusqu'ici, et d'empêcher les Anglais, afin qu'ils ne réussissent point au sujet du secours qu'ils réclament, de même que l'Impératrice ne se prête <239>point aux insinuations que les Autrichiens tâcheront de faire contre moi et mes intentions. Vous serez surtout attentif sur les intrigues que le comte de Rosenberg, homme fin et double, fera, et s'il est possible que vous pourriez disposer l'Impératrice de tenir les Saxons en respect et de leur donner à entendre qu'il ne devaient point s'opposer aux vues que j'ai de travailler pour l'Empereur et pour le rétablissement de la paix. Voilà ce qui me suffit présentement. S'il y a outre cela moyen de faire parvenir à sa consistance notre triple alliance, je serai par là au comble de mes désirs.

Quant à l'affaire concernant ce qui s'est passé au sujet du marquis de La Chétardie, vous pouvez compter et même avertir vos amis que la France n'en parlera point d'un ton haut, mais qu'elle le dissimulera et désavouera ledit marquis de La Chétardie. J'apprends même d'un bon lieu qu'elle a actuellement nommé le sieur d'Aillon pour être renvoyé à la cour. de Russie, uniquement parcequ'il s'est fort sagement conduit du temps qu'il fut en Russie ....

Je vous adresse ci-clos ma réponse à la lettre que la grande-duchesse des Russies m'a fait le plaisir de m'écrire, de même qu'à celle que j'ai eu la satisfaction de recevoir de la princesse d'Anhalt-Zerbst,239-1 que vous ne manquerez pas de leur présenter avec des compliments convenables.

Federic.

Nach dem Concept.



239-1 Nr. 1529. 1530.