1726. AU MINISTRE D'ÉTAT COMTE DE BEESS A DRESDE.
Berlin, 13 février 1745.
Le marquis de Valory, ministre de France à ma cour, est sur le point de se rendre à Dresde pour faire une tentative auprès du roi de Pologne, capable de le détacher de la cour de Vienne, par les appâts de la dignité impériale et d'autres convenances qu'on pourrait lui faire.
Ce ministre m'a d'abord sollicité de lui donner une lettre de créance ou un plein-pouvoir pour traiter en mon nom avec le roi de Pologne, mais je lui ai fait entendre que, toutes les démarches les plus amiables et les insinuations les plus douces que j'ai employées jusqu'ici auprès de la cour de Dresde, n'ayant été payées d'aucun retour d'amitié et de confiance, mais qu'on se tenait plutôt sur une réserve qui approchait de l'éloignement et de la défiance la plus marquée contre moi, et tout cela uniquement en haine de ce que j'ai fait pendant la dernière campagne en faveur de feu l'Empereur et de la France, j'avais raison de croire que plus je me mêlerais de cette négociation à la cour de Dresde, dont j'avais même fort mauvaise opinion, plus celle-ci se roidirait; qu'ainsi il ne faudrait pas que j'y paraisse comme premier mobile, mais qu'il pouvait insinuer simplement que la France se faisait fort à me faire acquiescer à tout ce de quoi ils pourraient convenir ensemble, pourvu que j'y trouvasse mes sûretés et mes convenances.
C'est dans ce sens-là que vous devez vous en expliquer envers le marquis de Valory, quand il vous devrait solliciter d'aller de concert avec lui ou de parler en mon nom au ministère de Dresde sur l'objet de la mission du marquis de Valory à la cour de Saxe, quoique d'ailleurs vous en userez confidemment avec ce ministre, en le mettant au fait, autant qu'il est possible, de la façon présente de penser de la cour où vous êtes, mais en vous retranchant toujours sur le défaut d'instruction pour agir ouvertement de concert avec lui dans sa négociation. Tout ce que vous pourriez faire, en cas que le ministère de Saxe vous en parlât, ce serait de faire entendre d'une manière vague et générale que vous croyiez que je ne serais point éloigné à favoriser les intérêts du roi de Pologne relativement aux conjonctures d'à présent, pourvu que<51> j'y trouve mes sûretés et mes convenances d'une manière également honorable et solide.
Vous prierez aussi le marquis de Valory de vouloir bien vous instruire de l'impression que ses insinuations pourraient avoir faite sur l'esprit du roi et de la reine de Pologne, quelle réponse on lui aura faite et quelle apparence il trouve de réussir dans sa négociation, pour laquelle vous l'observerez autant qu'il sera possible; et comme la cour de Saxe ne manquera pas d'exhaler en plaintes contre moi envers le marquis de Valory, vous le mettrez au fait du peu de fondement qu'il y a, de la manière dont on s'est conduit à Dresde à mon égard pendant la dernière campagne jusqu'ici et même avant ma lévée de boucliers en faveur de l'Empereur et de la France, de la défiance qu'on vous a toujours marquée, de leur éloignement et haine contre la France et de leur prévention outrée pour la cour de Vienne et de ses alliés, et généralement de tout ce qui peut donner des lumières à ce ministre pour la réussite de sa négociation, en me mandant avec tout le soin et tout le détail possible les progrès [qu'il pourrait faire] ou les refus qu'il pourrait recevoir, aussi bien que la façon dont la cour de Dresde s'expliquera envers d'autres ministres étrangers, et principalement ceux d'Angleterre, de Russie et de Hollande, sur le voyage du marquis de Valory.
Federic.
H. Comte de Podewils.
Nach dem Concept.