<451> mécontente de celle de Dresde, de ce que celle-ci n'a point témoigné assez d'empressement pour accéder au dernier traité fait entre les cours de Pétersbourg et de Vienne, lorsqu'elle y a été invitée par les comtes Bestushew et Esterhazy, mais qu'elle a voulu préalablement se stipuler des avantages plus réels et plus considérables que ceux qu'on lui a faits par les traités antérieurs. La cour de Vienne en est d'autant plus estomaquée parcequ'au commencement, et dès que le traité entre les deux cours susdites fut signé, celle de Dresde s'est plainte du peu d'attention qu'on avait pour elle en ne l'invitant pas à y accéder. Comme cette accession se traîne à présent, la cour de Vienne en rejette tout à la charge du comte de Brühl, qu'elle tient fort suspect de ce que depuis quelque temps il penche trop pour le parti français, et de ce que, pour complaire à la France, il ait mis tout en chemin afin que cette accession n'ait pu venir à sa perfection. Ladite cour est présentement même dans le sentiment qu'elle n'aura plus rien à espérer de la Saxe contre la France, et, selon mes avis secrets, elle prétend avoir en main une copie d'une lettre écrite du comte de Brühl au comte de Loss, dans laquelle il se doit être expliqué nettement que jamais la Russie ne porterait la Saxe à nuire directement ou indirectement à la France et à ses alliés. Par toutes ces raisons, la cour de Vienne s'est confirmée dans le sentiment que, puisqu'elle ne saurait espérer que, dans le cas qu'elle serait obligée d'entrer en guerre contre moi, ni la cour de Dresde ni celle de Hanovre, dont elle est à présent également mécontente, se joindraient à elle, sinon lorsque le sort de la guerre ne serait plus douteux, elle ne veut plus pousser l'affaire de l'accession de la Saxe à son dernier traité avec la Russie et laisser plutôt tomber toute cette négociation. Je sais même qu'elle vient de donner cet avis à la cour de Pétersbourg. Le seul sujet de satisfaction qu'elle a encore du comte de Brühl, c'est qu'il continue, à ce qu'elle sait de science certaine, à mettre tout en œuvre pour détacher la France de moi, et qu'il ne discontinue pas à me porter toute la haine possible. Outre cela, elle ne désespère pas de pouvoir corriger la cour de Dresde par celle de Pétersbourg, afin que la première modère au moins son grand penchant pour la France.
Voilà le précis des secrets avis que j'ai eus de Vienne à ce sujet, auquel je dois ajouter encore que la cour de Vienne, voyant qu'il lui est impossible de me détacher des intérêts de la France, veut à présent prendre le contre-pied et vient de se déterminer à mettre tout en œuvre pour détacher la France de moi, envisageant parfaitement bien qu'aussi longtemps que la France reste bien unie avec moi, elle ne saura jamais parvenir à ses fins qu'elle s'est proposées. C'est en conséquence de cela qu'elle tâchera à inspirer à la France et à ses ministres aux cours étrangères toute sorte de défiance contre moi, en leur insinuant que la France ne pourra jamais faire fond sur moi, et que ses intérêts me seraient toujours assez indifférents, tout comme elle veut faire inspirer