2606. AU SECRÉTAIRE WARENDORFF A SAINT-PÉTERSBOURG.
Potsdam, 18 avril 1747.
J'ai reçu votre dépêche du 1er d'avril. Si les ennemis du Chancelier souhaitent que l'affaire de l'envoi du secours à. donner à la reine de Hongrie parvienne à sa maturité, ils trouveront peut-être bientôt de quoi être satisfaits, et je viens d'être averti d'assez bon lieu que rien ne doit être plus décidé que la marche des troupes russiennes. Il y a d'ailleurs des lettres de Londres qui marquent que la nation a accordé au roi d'Angleterre la somme de 500,000 livres sterling, pour le mettre en état de pousser vigoureusement la guerre et de remplir les traités faits ou à faire avec les alliés du roi d'Angleterre pour l'année présente. Cette somme me paraît un peu trop forte pour les besoins ordinaires du temps présent, s'il n'y avait quelque dessous des cartes, et l'on ne pourra pas s'imaginer facilement à quoi l'on l'emploierait sinon à un puissant secours de troupes russiennes qu'on en voudra soudoyer.<368> Il m'est revenu encore que la cour de Vienne a envoyé un courrier en Russie avec tant d'empressement qu'un ministre de cette cour, la sachant à ce moment en défaut de l'argent, a avancé de sa bourse le voyage du courrier, afin de ne pas l'arrêter, et que, le lendemain, le lieutenant que le général Pretlack avait dépêché à Vienne, a suivi encore ce courrier. Toutes ces circonstances doivent servir à redoubler votre attention et à vous faire guetter de bien près la contenance que les ministres anglais et autrichien tiendront au retour de leurs courriers, et pour être informé à temps si le secours destiné à la reine de Hongrie se mettra effectivement en marche et vers où il le dirigera; si c'est pour la route de la Pologne, ou si l'on s'avisera de le faire transporter par mer, ou à Lübeck ou directement aux Pays-Bas; de quoi vous devez me faire votre rapport au plus tôt possible.
Au reste, il ne me paraît pas que vos conjectures soient justes lorsque vous m'avez mandé que les arrangements militaires de la Russie n'ont pour objet que la crainte de quelque entreprise de ma part contre elle; s'il y en avait une ombre d'apparence, le premier ministre se garderait bien de me faire tant d'avanies, comme il vous est connu qu'il m'a faites, et ordinairement on prend bien garde à ne pas révolter celui dont on craint le ressentiment; ainsi donc, vous ne devez pas donner à pareilles illusions et vous appliquer plutôt à être alerte sur tout ce que la cour où vous êtes médite, sans vous laisser endormir par des rapports de gens qui apparemment ne visent qu'à vous faire donner à travers.
Federic.
Nach dem Concept.