3111. AU MINISTRE D'ÉTAT COMTE DE PODEWILS, ENVOYÉ EXTRAORDINAIRE, A VIENNE.

Potsdam, 15 juin 1748.

Il m'est agréable de voir, par votre dépêche du 5 de ce mois, que vous commenciez à envisager les affaires dans leur vrai point de vue. Je n'ai jamais douté qu'il ne restât aux Autrichiens beaucoup de mauvaise volonté contre moi, qu'ils ne fissent leur possible pour agacer les Russes et les mettre du jeu, afin de rompre par là les conférences de la paix qui doit se conclure, d'être en état de continuer la guerre et même d'entreprendre sur moi. Mais en considérant :

1° Que la reine de Hongrie avait accédé purement et simplement aux préliminaires;

2° Que les deux Puissances maritimes et la France avaient déclaré de vouloir soutenir les arrangements qu'elles venaient de prendre par les préliminaires;

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3° Qu'autant que dureraient les négociations sur un traité formel de paix, la cour de Vienne n'était pas à même de retirer ses troupes;

4° Qu'il faudrait trois mois de temps avant qu'on pût procéder à la signature du traité définitif de paix;

5° Qu'ensuite il se passerait trois mois avant que les troupes autrichiennes puissent être de retour, et qu'ainsi

6° On se trouverait au mois d'octobre ou de novembre, avant que la cour de Vienne fût en état de remuer de nouveau —

je ne saurais, dis-je, après les considérations susdites, regarder que comme chimériques tous les mauvais desseins qu'aurait conçus la cour où vous êtes, et leur attribuer d'autant moins d'effet que, à l'approche du temps ci-dessus, les troupes auxiliaires russes se seront mises en marche pour retourner chez elles, pour éviter par là la demande qu'on pourrait faire sans cela à leur cour, à quel propos elles s'arrêtaient aussi longtemps en Bohême et en Moravie. Ajoutez à cela que la cour de Vienne est sur le point de congédier quinze de ses régiments, que je me trouve de mon côté dans la meilleure harmonie du monde avec l'Angleterre, et il ne vous sera pas difficile d'en conclure vous-même que je suis plus que fondé à être absolument tranquille sur ma situation présente.

Continuez néanmoins de donner toute votre attention aux démarches de la cour où vous êtes, quoique sans faire paraître la moindre inquiétude à cet égard. Au reste, je veux bien croire que, la paix une fois faite, la reine de Hongrie tâchera de mettre en meilleur ordre et ses finances et ses troupes. Je suis cependant persuadé qu'elle ne réussira pas pour ce dernier article, et qu'elle rencontrera de grands obstacles à surmonter, avant que de voir accomplies les vues qu'elle paraît avoir pour ses finances.

Quant au sieur Robinson, il m'importe peu qu'il ait quelque rancune contre moi, dès que je me trouve sur un bon pied d'intelligence avec sa cour.

Federic.

Nach dem Concept.