3679. AU CONSEILLER PRIVÉ DE LÉGATION BARON DE GOLTZ A MOSCOU.
Potsdam, 31 mai 1749.
Il se peut que, comme vous le marquez par votre dépêche du 8 de ce mois, le Chancelier ait effectivement été mécontent du contenu des dépêches parvenues en dernier lieu aux ministres des cours de Vienne et de Londres, et que ce soit là la véritable raison de cet air sombre que vous lui avez remarqué; mais il se peut aussi très bien, outre cela, que l'état désespéré de maladie dans lequel se trouve actuellement sa belle-fille543-1 y ait contribué beaucoup; car je sais de bon lieu que cette maladie l'a mis depuis quelque temps dans de grandes angoisses et qu'il en a caché avec grand soin le triste état aussi longtemps qu'il l'a pu; et, en effet, la mort de sa belle-fille ne serait pas un article peu considérable pour lui, mais plutôt une affaire de la dernière conséquence, en tant que par cette mort il pourrait se voir destitué toutà-coup du grand appui qui lui revient de la parenté du comte Rasumowski, et que d'ailleurs il se trouve à l'heure qu'il est dans une désunion extrême avec son propre fils.
Je suis entièrement de votre sentiment sur ce que vous dites que, selon vous, la Russie pourrait ne point vouloir commencer, cette année<544>ci, d'hostilités contre la Suède. Je ne sais cependant point encore pour cela si la Russie ne voudra remuer, le cas de la mort future du roi de Suède venant à exister, et je suis presque porté à croire que la cour où vous êtes tâchera tôt ou tard de porter son coup à la Suède, en saisissant pour cet effet la moindre bagatelle qui se présentera, pour la relever et décrier comme une affaire de la plus grande conséquence. C'est pourquoi le plus sûr sera que vous ne vous reposiez pas trop sur les apparences, et moins encore que vous les pensiez assez fortes pour vous en endormir sur les affaires, mais qu'avec une attention non interrompue vous continuiez toujours à observer jusqu'aux moindres menées du Chancelier et de toute sa clique.
Federic.
Nach dem Concept.
543-1 Vergl. S. 536.