<127> rognant le pouvoir impérial par une capitulation qui liât l'Empereur futur, et en rappelant, à cette occasion, les garanties que la France a rendues du traité de Westphalie. Le troisième moyen serait d'éclater contre le projet de l'élection et de s'y opposer à force ouverte.
Examinons à présent ces moyens. Le premier me paraît le moins convenable; c'est le parti de la faiblesse, et ce consentement simple serait déshonorant, tant pour l'Électeur palatin que pour moi. Nous aurions vu acheter les voix des Électeurs à Hanovre, on ne nous aurait pas fait l'honneur de nous demander notre avis, et nous aurions un empereur contraire à notre choix et à nos intérêts.
Le second moyen est susceptible de tout; rejeter la nécessité d'élire un empereur par raison du manque de majorité du jeune Archiduc, c'est ne point témoigner de passion, c'est gagner du temps, et c'est avoir les mains libres de faire ce que l'on jugera à propos. Supposé que malgré cet obstacle on voulût procéder à l'élection, ne se trouvera-t-il pas cent difficultés à former sur la capitulation du nouveau roi des Romains? ne pourra-t-on pas mettre le marché si haut qu'il perdra la moitié du pouvoir d'un empereur, pour avoir un titre en soi-même assez frivole? Et supposé que les Électeurs ne voulussent point se réunir sur les points principaux de la capitulation impériale, ne pourrait-on pas toujours rappeler la garantie de la France? Le grand mérite poütique n'est pas de nager contre le torrent, mais de ramener tous les évènements à son avantage.
Le troisième moyen est le plus violent; c'est de mettre le feu au quatre coins de l'Europe. La question se réduit à savoir : cela nous convient-il, cela ne nous convient-il pas?
Le roi d'Angleterre a donné des subsides à la plupart des Électeurs. La reine de Hongrie, soutenue de la Russie, en paix en Hongrie et en Italie, a les bras libres. La France ni la Prusse ne trouveraient point dans cette guerre de diversion en Lombardie; la France probablement n'aurait point à espérer du secours de l'Espagne. Nos ennemis auraient donc augmenté d'un allié, et nous nous trouverions apauvris de l'Espagne. La Prusse aurait à combattre la Russie et l'Autriche, et la France aurait sur les bras toutes les forces de l'Empire, les Anglais, les Hollandais, et peut-être des troupes que la Reine pourrait retirer de l'Italie. Je crois que la France est la puissance la plus foncièrement formidable de toute l'Europe; mais les Anglais ne trouveraient-ils pas des ressources pour fournir à leurs alliés de quoi faire deux campagnes? Et si nous tirons l'épée, qui pourra nous assurer que nous pourrons la remettre dans le fourreau, lorsque nous le jugerons à propos? Si le temps pressait, si les conjonctures étaient favorables, si le Turc attaquait la Hongrie : enfin, s'il y avait quelque évènement qui nous présentât une perspective favorable, je serais le premier à représenter au roi de France la facilité de l'entreprise et les avantages qu'elle entraîne-