5193. A LA REINE DE SUÈDE A STOCKHOLM.
Eigenhändiges Schreiben der Königin von Schweden, Stockholm 2. November: „Mon très cher Frère. J'ai reçu les deux lettres que vous avez bien voulu m'écrire,524-1 dont la première contenait les sentiments de quelques puissances étrangères sur les circonstances présentes des affaires de Suède. Je n'en suis nullement surprise, et, si j'étais dans leur cas, je pourrais bien penser de même; mais je vous avoue, mon cher frère, que j'ai été étonnée de voir par votre dernière lettre que vous n'êtes point au fait de ce qui se passe ici, et que vous soyez persuadé que les démarches de l'ambassadeur de France sont conformes aux ordres de sa cour. Je puis croire que celle de France peut, sur les rapports de son ministre, s'être prêtée à envoyer de l'argent pour l'élection de Gyllenborg, ce qui est une chose toute naturelle, puisque l'on lui a fait envisager qu'Ungern pourrait bouleverser le système, ce qui est faux et de nulle apparence; mais jamais la France n'a donné ordre à son ministre de tenir des discours indiscrets contre la cour, ni de se déclarer ouvertement sur les affaires intérieures du royaume. Je puis vous assurer, mon cher frère, que cette conduite a indigné une grande partie de la nation, et que ceux mêmes qui sont du système, en sont outrés. Je me flatte encore que vous ferez réflexion sur tout ceci, puisque vous pouvez être très persuadé que les affaires n'y gagnent point, mais au contraire qu'elles pourraient bien y perdre. Je vois encore, mon cher frère, que vous êtes dans l'idée que c'est le parti du Sénat et de Gyllenborg qui ont proposé l'augmentation des revenus du Roi; c'est tout le contraire, la chose fut proposée à la maison de Noblesse par un homme du parti opposé, et quoiqu'il y en eût de ceux du maréchal de la Diète qui voulurent ramener la délibération au Comité Secret, ils trouvèrent tant d'opposition qu'il fallut céder, ce qui les a beaucoup décontenancés. Jusqu'à présent on ne sait point où se trouve la pluralité, et avant qu'on soit allé aux voix, on l'ignore. Ce n'est point l'élection du Maréchal qui décide, il y a souvent des raisons personnelles qui lui font avoir une pluralité; il est précisément dans le cas. Ensuite, il y a à l'élection peut-être quatre cent personnes qui ne viennent que pour la nomination du Maréchal et qui ne donnent leurs voix qu'à celui qui les paie le mieux; ils ne restent que jusqu'à ce que le Comité Secret est formé, et ils reçoivent encore leur salaire pour la seconde élection; ensuite ils partent. C'est ce qui rend la pluralité indécise, et, avant qu'on aille aux voix, personne ne sait de quel côté penche la balance; je crois cependant que demain on en sera sûr, et qu'il pourrait bien y avoir une Votirung. D'ailleurs vous n'avez rien à craindre pour quelque démarche hardie du côté de la cour; je souhaite seulement que vous puissiez être content, si c'est le Sénat qui l'importe, et que vos intérêts s'y trouvent. Tout ce que je puis vous dire,<525> mon cher frère, c'est que je suis assez au fait pour savoir ce qui en est, mais c'est sur quoi je ne puis point m'expliquer sans chiffre. Continuez-moi, mon cher frère, votre amitié et croyez-moi à jamais tout à vous avec le plus parfait attachement, mon très cher frère, votre très dévouée sœur et servante Ulrique.“
Potsdam, 14 novembre 1751.
Ma très chère Sœur. Si je souhaite que cette Diète se passe tranquillement, je crois, ma chère sœur, que vous sentez vous- même combien il est de vos intérêts et de ceux de toute l'alliance que cela se passe ainsi; mais ce n'est pas à dire d'un autre côté que je ne vous souhaite tous les avantages qui sont comportables avec la situation présente de l'Europe.
Le grand point, et qui est plus important encore pour vous que pour nous autres, c'est de ne point donner à des voisins mal disposés de prétexte de pouvoir vous attaquer. Quant, au reste, aux démêlés que vous pouvez avoir avec le Sénat, je souhaite de tout mon cœur qu'il ne s'y mette point d'aigreur et que vous parveniez à vos fins, sans que cela tire des suites après soi. La France veut absolument tenir le parti du Sénat, et je vous tais toutes les persécutions qu'on m'a faites de Versailles sur ce sujet; que puis-je donc faire de mieux que vous prêcher la modération? Que le ministre de France se conduise bien ou mal, quoi qu'il en soit, il faut le dissimuler; car quoique je convienne avec vous que ce serait pour le bien des affaires qu'il fût rappelé, je vous avertis en même temps que de demander son rappel, serait indisposer cette cour que nous avons toutes les raisons du monde de ménager. La force ne fera pas cette affaire pour y réussir, il faut employer l'intrigue, et ce n'est pas l'ouvrage d'un jour. Pour moi, ma chère sœur, qui suis dans un pays de souveraineté, il me faut dissimuler souvent et faire bonne mine à mauvais jeu. N'écoutez pas votre ressentiment seul, mais consultez vos interêts; ils vous parleront sur ce sujet, comme je vous parle. Pour moi, j'ai donné ordre au sieur de Rohd, avant la Diète même, de ne se mêler en rien de ce qui regarde l'intérieur du royaume, de ne point marquer de partialité et de laisser vider ces affaires-là à ceux qu'elles regardent; il l'a fait.
La France en a agi autrement, mais c'est elle qui paie, et je sais que, pour moi, il ne me convient pas de me brouiller avec elle, et je crois, ma chère sœur, que, si vous vous consultez bien, vous trouverez que cela vous convient tout aussi peu.
Je vous demande pardon de tout ce verbiage, mais vous verrez, ma chère sœur, que pour ma personne j'y suis fort embarrassé. Recevez les assurances de la tendre amitié et de la parfaite estime avec laquelle je suis à jamais, ma très chère sœur, votre très fidèle frère et serviteur
Federic.
Nach Abschrift der Cabinetskanzlei.
<526>524-1 Nr. 5134 S. 473; Nr. 5145 S. 485.