<219> vous dirai naïvement que je vous aime de tout mon cœur et que j'estime bien autrement dans Votre Majesté l'homme bienfaisant que le roi. Pardonnez-moi mes écarts, qui partent de l'enthousiasme que m'inspirent d'aussi belles qualités, et soyez persuadé, tout roi que vous êtes, que les plus grands intérêts ne m'auraient pas fait tenir ce langage, si ce n'était pas la vérité qui parlât ainsi dans mon cœur. Ce sont les sentiments qui m'attacheront toujours à vous, étant bien sincèrement de Votre Majesté le bon frère
Federic.
Nach Abschrift der Cabinetskanzlei.
5607. AU BARON DE SCHEFFER, SÉNATEUR DE SUÈDE, A BERLIN.
Denkschrift des Freiherrn von Scheffer,1 Beilage zu dessen Schreiben an den König, Berlin 25. September: „Il est certain que le ministère de France est actuellement aussi bien intentionné qu'il soit possible de l'être pour les intérêts des alliés de cette couronne; mais il n'est pas moins certain que sa faiblesse est extrême, soit par la désunion qui règne entre les ministres, soit par la médiocrité du génie de quelquesuns d'entre eux.
Il n'y a au monde que Votre Majesté seule qui puisse remédier à ce mal, par l'influence que Lui donnent en France non seulement le besoin que l'on a de Son amitié, mais encore la haute opinion que l'on a conçue de Ses lumières et de Sa grande capacité dans les affaires. Il n'est pourtant que trop vrai, comme Votre Majesté m'a fait la grâce de m'observer, que les ministres de France sont très chatouilleux, et que la crainte d'être gouvernés2 rend souvent infructueux les bons conseils qu'on pourrait leur donner.
Mais, outre que M. de Saint-Contest est infiniment moins susceptible de ce sentiment que ne l'a été son prédécesseur, il a heureusement placé sa confiance dans quelqu'un qui, loin d'envenimer, comme on l'a pu faire ci-devant, les choses qui viennent de la part de Votre Majesté, est occupé sans cesse à détruire l'effet des mauvaises insinuations que font souvent les ennemis communs de Votre Majesté et de la France. Je suis donc intimement persuadé que dans la situation actuelle du cabinet de France il dépend de Votre Majesté de mettre dans les négociations et dans la conduite de cette cour au dehors toute la suite, toute l'élévation et toute la fermeté qui y manquent.
Il pourra bien arriver que le ministre, dans le premier moment, réponde à une proposition d'une manière fort vague et peut-être même absolument négative. Mais si la même proposition lui est faite par écrit et qu'on lui demande une réponse par écrit, sans qu'il paraisse que ce soit par défiance, je suis encore convaincu que la réponse, alors, sera fort différente de celle qu'il aura donnée de bouche.
Je ne suis cependant pas assez téméraire pour assurer que cette précaution seule soit suffisante pour amener toujours les esprits au but désiré; mais j'ose bien garantir que, si Votre Majesté a la patience de Se prêter à la résistance qu'Elle pourra trouver dans le premier commencement d'une affaire, et qu'Elle veuille bien malgré cela persister dans Ses insinuations et y mettre toute la force des raisons qui déterminent Votre Majesté dans Sa persévérance, j'ose garantir, dis-je, qu'alors on se rendra en France à l'avis de Votre Majesté et qu'ainsi Elle aura la satisfaction de faire adopter à cette cour les bons partis qu'il y a à prendre.
Quant aux affaires de Pologne nommément, je sais de science certaine que le roi de France serait très flatté de la confiance que Votre Majesté lui témoignerait en
1 Bisher schwedischer Gesandter in Paris. Vergl. S. 127; Bd. VIII, 440. 502. 532.
2 Vergl. S. 18 und Droysen, Gesch. der preussischen Politik V, 3, 345.