4. DE LA MÊME.
Le 7 mars 1756.
Mon très-cher frère,
En considération des bontés que vous me témoignez, je ne puis vous regarder que comme un père qui s'intéresse à l'établissement et au bien-être de ses enfants. Ce nom de père que je ne puis prononcer sans ressentir tout le respect, toute l'amitié et toute la vénération qui lui est due, ce nom si cher qui revit en vous, m'encourage à la confiance. Je vais, mon cher frère, vous exposer l'état de ma situation. Vous voulez que je parle, je suis soumise à vos volontés; nommez-moi le jour, je m'empresserai à vous obéir. Mais, faut-il vous l'avouer? je n'ai pas la valeur d'un écu pour faire le voyage, et sans un dérangement total, il n'est presque pas possible que je le puisse entreprendre. Tout l'argent que j'ai reçu de l'abbaye, je l'ai employé à m'équiper, lit, coffres, livrées et autres choses nécessaires qui me manquaient. Vos soins généreux se sont étendus à m'accorder les chevaux, la cuisine, la vaisselle, le linge pour la table, et à vous charger des présents que je suis obligée de donner le jour de ma réception. J'en suis pénétrée de la plus vive reconnaissance; mais daignez encore, en père tendre et compatissant, me donner de quoi subvenir aux autres dépenses qui me restent à faire. Je n'espère qu'en vos bontés, j'y fonde tout mon espoir. J'ai reçu tant de marques de votre bienveillance, qu'il serait honteux si j'eusse le moindre doute qu'elles viendraient me manquer dans une occasion qui doit décider du reste<437> de mes jours. Non, mon cher frère, tout en moi n'est que confiance, respect, tendresse et soumission. J'ai l'honneur d'être, etc.