<228>Les prêtres de ces temps étaient plus artificieux et plus fourbes que le peuple; outre leur sacerdoce, ils exerçaient une triple charlatanerie : ils fabriquaient des oracles, et se mêlaient d'astrologie et de médecine.36 Il ne fallait pas tant de ruses, pour abuser ce peuple imbécille et grossier; aussi fut-il bien difficile de détruire une religion ancrée par tant de superstitions dans les esprits. Toute l'Allemagne était encore attachée au culte des idoles, quand Charlemagne et, après lui, Henri l'Oiseleur entreprirent de convertir ces peuples : après bien des efforts inutiles, ils n'y réussirent qu'en noyant l'idolâtrie dans des torrents de sang humain, qu'ils versèrent.

ARTICLE SECOND. CONVERSION DES PEUPLES AU CHRISTIANISME ET DE L'ÉTAT DE LA RELIGION CATHOLIQUE DANS LE BRANDEBOURG.

La folie de tous les peuples est d'illustrer la noblesse de leurs lois, de leurs coutumes et de leur religion, par l'antiquité de leur origine. Les Allemands, non contents d'avoir dérobé leurs dieux aux Grecs, ont encore voulu passer pour aussi vieux chrétiens que les autres nations de l'Europe : ils ont trouvé dans saint Jérôme je ne sais quel passage qui dit, à ce que Staphoniusa et Schmidtius prétendent, que l'apôtre Thomas vint prêcher l'Évangile au nord de l'Allemagne; il n'y prêcha donc que l'incrédulité, car le peuple demeura païen bien longtemps après lui.


36 Freinshemius [Trithemius] et Schmidt.

a L'Auteur veut dire Stapletonus. Thomas Stapletonus, Tres Thomae. Coloniae Agrippinae, 1612, in-8, p. 12. Heinrich Schmidt, Einleitung zur Brandenburgischen Kirchen-Historie. Berlin, 1740, in-4, p. 3.