<252> Conrad Wimpina, professeur de Leipzig, devint le premier recteur de cette nouvelle université, et il en dressa les statuts. Mille étudiants se firent inscrire dès la première année dans les fastes de l'université.

Il arriva, pour les progrès des sciences, que Joachim Nestor les protégea autant que son père; c'était le Léon X du Brandebourg : il possédait les mathématiques, l'astronomie et l'histoire; il parlait avec facilité le français, l'italien et le latin; il aimait les belles-lettres, et il fit des dépenses considérables pour encourager ceux qui s'y appliquaient.

Ce n'était pas l'ouvrage d'un jour, que de civiliser une nation qui avait été sauvage pendant tant de siècles; il faut bien du temps pour que la douceur du commerce des sciences se communique à tout un peuple. Les jeunes gens étudiaient, à la vérité; mais ceux qui étaient d'un âge mûr, demeuraient attachés à leurs anciens usages et à leur grossièreté; les nobles volaient encore sur les grands chemins; la dépravation des mœurs était si générale en Allemagne, que la diète de l'Empire, assemblée à Trèves, voulant y mettre un frein, défendit de blasphémer, et de s'abandonner à ces excès de débauche qui ravalent l'humanité et rendent les hommes inférieurs aux animaux.

Il y avait dès lors des vignes plantées dans l'Électorat; le baril de vin se vendait de ce temps à trente gros, et le boisseau de seigle, à vingt et un liards : les espèces commençaient à circuler davantage. Joachim Nestor fit même construire quelques bâtiments, entre autres le château de Potsdam. Tout le monde était habillé à l'allemande, ce qui répond à peu près à l'ancien habillement espagnol : les hommes portaient des pourpoints et de larges fraises; les princes, les comtes et les chevaliers portaient des chaînes d'or au cou;60 il n'était permis aux gentilshommes que d'avoir trois anneaux d'or à la cravate; l'habillement des femmes ressemblait à celui des Augsbourgeoises ou des filles de Strasbourg.


60 Lockelius.