<232>A lui jeter d'un coup le chef en bas.
Un vieux Hongrois tout doucement l'arrête :
« Je crois, Franquin, que vous n'y pensez pas.
Notre devoir exige qu'on amène
Chaque captif au camp du bon Lorraine;
Ménagez donc celui-ci tout exprès,
Car il nous peut révéler des secrets. »
Il dit; d'abord Franquin, quoique avec peine,
Fait un effort, se modère, et rengaine.
Mon cher lecteur, si tu prétends savoir
Si ce Hongrois n'était pas une sainte
Fort à propos usant de cette feinte,
Comme en avez dans ce livre pu voir,
Ah! pour le coup, il n'est en mon pouvoir
De l'expliquer; car dessus cette affaire
Mon chroniqueur sut prudemment se taire.
En remontant même jusqu'à Turpin,a
Sur ce sujet on n'éclaircirait rien :
Pensez-en donc ce qu'il vous plaît d'en croire.
Car ce fait-là ne fait rien à l'histoire.
Le dur Franquin changea d'abord de ton
Vers le badaud; ce féroce lion
Devint traitable et doux comme un mouton;
Même il lui fit des excuses passables.
Chemin faisant, on gagne la forêt
D'arbres touffus, obscurs, impénétrables,
Où le soleil ne put percer jamais
De ses rayons brillants et favorables.


a Turpin, archevêque de Reims vers la fin du huitième siècle. On lui attribue la Vie de Charlemagne et de Roland, sans toutefois pouvoir appuyer cette conjecture sur aucun renseignement positif.