<139>Qui, sans cesse absorbés dans des projets sinistres,
Des attentats fameux sont les cruels ministres.
Que de leurs sons flatteurs la douce impression
Ne vous détrompe point de leur ambition.
Leur dehors est couvert du fard de la justice,
Leur cœur impénétrable est rempli d'artifice;
Vainement sous un masque ils pensent se cacher,
D'une main assurée il le faut arracher,
Il faut, en découvrant leurs passions iniques,
Exposer au grand jour ces démons politiques.
Ces farouches mortels, si durs et si hautains,
Tendres pour l'intérêt, pour nous pleins de dédains,
Si souvent arrosés des pleurs des misérables,
N'ont jamais amolli leurs cœurs impitoyables.
Trop hauts dans le succès, trop bas dans le malheur,
Le destin règle seul leur haine et leur faveur;
S'ils sont compatissants, c'est qu'ils sont sans ressource,
Et l'amour de la paix n'est qu'au fond de leur bourse.
Non, le Sphinx qui dans Thèbe exerçait sa fureur,
Ces monstres qui d'Hercule éprouvaient la valeur.
Les maux contagieux, les famines, les pestes,
Sont moins à redouter, sont cent fois moins funestes,
Que tous ces scélérats dont les complots pervers
Jusqu'en ses fondements ébranlent l'univers.
Craignez l'infection et le poison que verse
Dans un cœur simple et pur leur dangereux commerce.
D'abord on les observe, on craint d'être trompé,
Tôt ou tard dans leur piége on est enveloppé;
Il faut jouter contre eux, l'artifice a ses charmes,
Et l'on se sert enfin de leurs perfides armes.