<123>Qui jamais de vous n'approcha.
Ce Sénèque qui nous prêcha
De nous réduire à l'abstinence
Passait ses jours dans l'abondance,
A la cour faisait des jaloux,
Et se moquait d'eux et de nous
Dans ses écrits pleins d'arrogance.
Mais chez vous rien n'est contrefait;
Philosophe dans la pratique,
Au-dessus de toute critique,
Dans Pöllnitz tout l'homme paraît;
Sans l'embarras de l'intérêt,
Sans bien, content de peu de chose,
Dans l'univers rien ne s'oppose
Aux vœux de votre cœur discret.
Qu'à vos désirs je porte envie,
O sage, ô fortuné baron!
Sans le fardeau d'un trop grand nom,
Vous passez en paix votre vie;
La fausseté n'a point le front
De pavaner sa face impie
Pour tromper votre bonhomie
Au milieu de votre salon;
Au lieu qu'un roi, pour l'ordinaire,
Les matins, lorsqu'il se fait voir,
Dans ces vains respects du devoir
Que lui rend sa cour mercenaire
Ne lit point dans le caractère;
Il peut croire, sans penser noir,
Que dans lui l'intérêt vénère
Et la fortune, et son pouvoir.