<64> écoles; ce cabinet doit être vendu incessamment. On y trouve surtout la Léda du Corrége,a du cabinet du Régent, et que feu M. le duc d'Orléans fit pieusement couper en quatre morceaux, qui furent heureusement sauvés du feu par Coypel, qui ne put cependant en garantir la tête; il a rapproché ces morceaux, et la tête a été restituée par de Lien. Ce tableau, si beau par lui-même, et célèbre par ses aventures, sera poussé, dit-on, jusqu'à vingt-cinq mille livres. Il a environ six pieds de haut sur cinq de large; il tiendrait bien magnifiquement sa place dans la galerie que V. M. prépare.

M. de Voltaire s'est enfin décidé entre Genève et Rome; il vient de faire acheter par Cramer, son libraire, un bien de campagne fort beau et bien bâti, sur le lac de Genève, qu'il a payé quatre-vingt-sept mille deux cents livres. Il en a avancé l'argent, et Cramer le lui a vendu à vie quarante mille francs. Il fait actuellement une édition complète, en cinq volumes, de son Histoire universelle. Il paraît fixé à demeurer dans ce pays-là, ainsi que madame Denis; ils y ont fait venir tous leurs meubles et tous leurs livres. Voilà des vers qu'il a faits sur la ville de Lyon :

Il est vrai que Plutus est au rang de vos dieux,
Et ce n'est pas tant pis pour votre aimable ville;
Il n'a point de plus bel asile.
Ailleurs il est aveugle, il a chez vous des yeux;
Il n'était autrefois que dieu de la richesse,
Vous en faites le dieu des arts.
J'ai vu couler dans vos remparts
Les ondes du Pactole et les eaux du Permesse.b

M. de Fontenelle a été à la mort; il en a rappelé, et, malgré ses quatre-vingt-dix-neuf ans, il dîne hors de chez lui tous les jours, comme il a fait toute sa vie. Son esprit est toujours gai, et il ne doit


a Voyez t. XIX, p. 170.

b Voyez les Œuvres de Voltaire, édit. Beuchot, t. XIV, p. 421 et 422.