<264>Vous accoutumerez le parterre à tout ce que vous voudrez; des vers de la beauté des vôtres peuvent par leur imposture faire illusion sur le fond des choses. Je suis curieux de voir Oreste, comment vous aurez remplacé Palamède,a et de quelles autres beautés vous aurez enrichi cette tragédie. Si vous pensiez à moi, vous me feriez la galanterie de me l'envoyer; je suis prévenu pour vous, il ne tient donc qu'à vous de recevoir mes applaudissements. Mais se soucie-t-on à Paris que des Vandales et des barbares sifflent ou battent des mains à Berlin?

Cet Éloge de nos officiers tués à la guerre me rappelle une anecdote du feu czar. Pierre 1er se mêlait de pharmacie et de médecine; il donnait des remèdes à ses courtisans malades, et lorsqu'il avait expédié quelques boyards pour l'autre monde, il célébrait leurs obsèques avec magnificence, et honorait leur convoi funèbre de sa présence. Je me trouve à l'égard de ces pauvres officiers dans un cas à peu près semblable : des raisons d'État m'obligèrent à les exposer à des dangers où ils ont péri; pouvais-je faire moins que d'orner leurs tombeaux d'épitaphes simples et véritables? Venez au moins corriger ce morceau plein de fautes, pour lequel je m'intéresse plus que pour tous mes autres ouvrages. Des affaires m'appellent en Prusse au mois de juin; mais du premier de juillet jusqu'au mois de septembre je pourrai disposer de mon temps, je pourrai étudier aux pieds de Gamaliel, je pourrai

Vous admirer et vous entendre,
Et du grand art de Cicéron,
De Thucydide et de Maron
M'instruire, et par vos soins apprendre
Le chemin du sacré vallon;
Mais pour y mériter un nom,
Du feu que votre esprit recèle


a Personnage de l'Électre de Crébillon.