<294> forces si nombreuses. Voici le cas de la question. Nous avions battu l'ennemi en bataille rangée; son aile droite était coupée et séparée de sa gauche; j'étais marché avec tout ce que j'avais pu assembler de cavalerie et d'infanterie pour couper les fuyards de la Sasawa, ce qui réussit si bien, que je les poussai jusque sous le Wyssehrad, et les forçai de se jeter pêle-mêle dans la ville. J'avais détaché après les fuyards qui avaient passé la Sasawa auprès de Beneschau. Si je laissais ressortir ceux de Prague, je remettais en question ce qui avait été une fois décidé, et je laissais échapper une occasion unique de faire quarante mille hommes prisonniers de guerre; nous les avions si étroitement serrés, des deux côtés de la ville, par nos postes et nos redoutes, qu'ils n'osaient plus penser à tenter une sortie. L'on espérait, par le moyen du feu et des bombes, de détruire quelques-uns de leurs magasins et de les prendre par famine. C'était l'unique moyen raisonnable pour les obliger à la reddition. Vouloir les assiéger, c'aurait été entreprendre l'impossible, vu la nombreuse garnison; prendre la ville par assaut, c'aurait été se jouer de la vie des hommes et hasarder plus que la prudence ne le permet à aucun généraL. cette bloquade, jointe au bombardement, avait si bien approché les choses du but que l'on désirait, que cette armée bloquée n'aurait pu tenir que jusqu'au 28 de juin tout au plus, après quoi elle aurait été obligée de mettre les armes bas.

Si nous n'avions rencontré d'autres obstacles que ceux du siége et de la nombreuse garnison de Prague, nous aurions réussi sans faute; mais voici les difficultés qui nous furent les plus nuisibles, et qui à la fin nous surmontèrent. L'on sait que le maréchal Daun était en pleine marche, avec un corps de quatorze mille hommes, pour joindre M. de Browne auprès de Prague; l'on sait que ce corps se trouvait le jour de l'action auprès de Böhmisch-Brod. Je détachai le prince de Bevern, avec quinze bataillons et soixante-dix escadrons, pour éloigner ce corps, dont le voisinage nous était dangereux. Le