<11>L'usage de ces combats semble être originairement français. Peutêtre que les Maures, qui inondèrent l'Espagne, l'établirent dans ce pays avec leur galanterie romanesque. On trouve dans l'histoire de France qu'un certain Godefroi de Preuilly, qui vivait l'an 1060, était le rénovateur de ces tournois. Cependant Charles le Chauve, qui vivait l'an 844, en avait déjà tenu à Strasbourg, lorsque son frère Louis d'Allemagne l'y vint voir. Cette mode passa en Angleterre dès l'an 1114, et Richard, roi de la Grande-Bretagne, l'établit dans son royaume l'an 1194. Jean Cantacuzène dit qu'au mariage d'Anne de Savoie avec Andronic Paléologue, empereur grec, ces combats, dont l'usage était venu des Gaules, se célébrèrent en 1226. Il y périssait souvent du monde lorsqu'ils étaient poussés à outrance : on lit dans Henri Knighton,a qu'il se fit un tournoi à Châlons en 1274, au sujet d'une entrevue entre la cour du roi d'Angleterre, Édouard, et celle du duc de Bourgogne, où beaucoup de chevaliers bourguignons et anglais demeurèrent sur la place. Les tournois passèrent en Allemagne dès l'an 1136. Les chevaliers s'envoyaient des lettres de défi d'un bout de l'Europe à l'autre, et il n'était permis qu'à ceux qui étaient armés chevaliers de faire de ces défis. Leurs lettres portaient, à peu près, qu'un tel prince, s'ennuyant dans une lâche oisiveté, désirait le combat, pour donner de l'exercice à sa valeur et pour signaler son adresse. Elles marquaient le temps, le nombre de chevaliers, l'espèce d'armes, et le lieu où le tournoi devait se tenir, et enjoignaient aux chevaliers vaincus de donner aux chevaliers vainqueurs un bracelet d'or, et un bracelet d'argent à leurs écuyers. Les papes s'élevèrent contre ces dangereux divertissements. Innocent II, en 1140, et depuis Eugène III, au concile de Latran, en 1313, fulminèrent des anathèmesa et pro-


a L'Auteur a trouvé le nom de ce chroniqueur anglais dans le grand Dictionnaire historique de Moréri, art. Tournois.

a Le Roi a emprunté ce qu'il dit ici des tournois du grand Dictionnaire historique de Moréri, art. Tournois; mais après les mots Eugène III, au concile de Latran, il a omis ceux-ci « tenu l'an 1179 », et le nom de « Clément V » devant en 1313. Quant à Moréri lui-même, dans l'édition d'Amsterdam de 1740, comme dans celle de Paris de 1759, le passage Eugène III, au concile de Latran, tenu l'an 1179, est inexact; il devrait y avoir Alexandre III, car Eugène III mourut en 1153.