<141>Ce mélange fâcheux de souffrance et de gloire
De l'archive des temps remplit la longue histoire
De désastres cruels.
Un bonheur toujours pur, dont l'éclat se conserve,
Se refuse à nos vœux; le destin le réserve
Pour les dieux immortels.

Au courage obstiné la résistance cède,
Un noble désespoir est l'unique remède
Aux maux désespérés;
Le temps met fin à tout, rien n'est longtemps extrême,
Et souvent le malheur devient la source même
Des bonheurs désirés.

Les aquilons mutins d'un ormeau qu'on néglige
Par leurs fougueux assauts font incliner la tige,
Qui cède pour un temps;
Mais de la molle arène et du niveau de l'herbe
Il se lève, et dans peu de sa tête superbe
Il ombrage les champs.

Dans les bras d'Amphitrite, où son éclat expire,
Le soleil de la terre abandonne l'empire
Aux ombres de la nuit;
Mais ses rayons vainqueurs au point du jour éclipsent
Ces flambeaux lumineux, ces astres qui pâlissent,
Et l'obscurité fuit.

Telle m'apparaissant couverte de ténèbres,
Ma patrie éplorée, à ses voiles funèbres
Attachant ses regards,
De nos calamités l'âme encore effrayée,
Sur nos lauriers flétris tristement appuyée,
Maudissant les hasards;