6203. AN DEN ETATSMINISTER GRAF PODEWILS IN BERLIN.

Potsdam, 8. Februar 1754.

Nachdem Se. Königl. Majestät mir exprès befohlen haben,235-6 beiliegenden aus verschiedenen letzteren Depeschen des Herrn Geheimen Rath von Maltzahn zu Dresden zusammengezogenen Extract die polnische Affairen betreffend an Ew. Excellenz zu übersenden, und dabei<236> zu vermelden, wie Dieselbe nach davon gemachtem eigenen Gebrauch solchen sorgfaltigst und unter Dero eigenen Beschluss asserviren, auch denselben niemanden weiter sehen lassen noch communiciren möchten, als nur einig und allein des Etatsministers Herrn Grafen von Finckenstein Excellenz, so habe solchem mir anbefohlenen hierdurch schuldigst nachkommen sollen. Wobei mich noch zu melden unterstehe, dass im Fall Ew. Excellenz desfalls etwas an des Königs Majestät gelangen zu lassen vor nöthig erachteten, ich sehr wünschete, dass solches an Höchstdieselbe immediate ohnvorgreiflich geschehen könnte.

Eichel.

Extraits des dernières dépêches du conseiller privé de Maltzahn à Dresde faites immédiatement au Roi.

Ce qu'il y de bien certain dans le raisonnement du sieur Benoît,236-1 c'est que la cour de Saxe a grande envie de prendre à la prochaine Diète de Pologne des mesures pour s'assurer de la succession au trône. Je n'ignore point les démarches qu'on a faites à Vienne et en Russie pour former une confédération, mais j'ai aussi appris qu'on s'est peu positivement expliqué là-dessus à la première cour.

Il m'est revenu que le sieur Gross a envoyé un rapport sur les affaires de Pologne, après que le chancelier Bestushew lui en avait demandé, et promis à la cour de Dresde qu'il l'accompagnerait de ses réflexions. Mais il faut bien que le comte Brühl n'ait trouvé lesdites réflexions de telle importance que les promesses du Chancelier les avaient fait imaginer, puisqu'il s'en est ouvert à un de ses amis confidents que le Chancelier y regardait comme décidé qu'un prince de Saxe est toujours préférable à tout prince étranger, pour être élu roi de Pologne, et même à un Piaste, d'autant qu'il serait difficile de pouvoir jamais se fier à un Polonais dont l'élévation coûterait beaucoup de dépenses et causerait bien des troubles, comme la Prusse et la France voudraient placer sur le trône un Polonais de leur parti et chercheraient à y intéresser la Porte Ottomane. Que, si celui qu'on élèverait à la royauté, était pauvre, il serait bientôt acheté par l'argent de la France et chercherait par l'instigation de cette cour, et en partie par son propre mouvement, l'appui des Turcs. Qu'on trouverait, au contraire, d'abord de la part des Polonais moins d'opposition à l'élévation d'un prince de Saxe que si l'on donnait la foi à un de la nation plutôt qu'à l'autre; que la Saxe pouvait s'aider elle-même par ses troupes et son argent et serait soutenue par les cours de Vienne et de Londres et des Hollandais. Que l'inclination par laquelle un prince saxon devait être porté à s'attacher à la Russie, serait appuyée par la nécessité de s'assurer contre ce qu'il serait obligé de souffrir du roi de Prusse dans ses États de Saxe et contre le parti que conjointement avec la France il236-2 tiendrait toujours en Pologne contre lui. Que la Saxe n'avait au<237>cune liaison avec la Porte Ottomane et que le parti qu'elle se ferait en Pologne devait être censé toujours plutôt russe que saxon.

Au reste, j'ai appris de bon lieu que, dans une conférence que le sieur Gross a eue avec le chevalier Williams, avant le départ de celui-ci de Dresde, sur les affaires de Pologne et la confédération à former à la prochaine Diète, le sieur Gross a déclaré que, bien qu'il convînt de la nécessité d'un pareil arrangement, néanmoins l'Impératrice sa souveraine, sur un rapport que le Chancelier lui en avait fait, avait déclaré son étonnement sur ce que l'on mettait à tout bout de champ une élection au trône sur le tapis, tandis que le roi de Pologne jouissait de la meilleure santé et que le Prince Électoral était non seulement d'une constitution faible, mais avait encore à encourir le risque de la petite vérole, de sorte qu'après avoir tout fait pour lui, il se trouverait peut-être, à cause de l'état de sa santé, qu'on aurait travaillé en vain; qu'au reste, quelque efficace que serait le secours qu'elle donnerait en pareille occassion, elle ne voulait pas être chargée seule de tout, mais savoir à quoi on pourrait s'attendre des autres alliés.

Malgré tout cela, je viens d'être informé que le chancelier Bestushew ne laisse pas de presser la cour de Saxe sur un concert à prendre avec la cour de Vienne et de l'assurer qu'en attendant des démonstrations plus efficaces de la bonne volonté de la Russie, on avait pris la résolution de s'assurer des principaux Polonais par des pensions et des présents; que pour cet effet il avait fait assurer au Primat237-1 une pension annuelle de 7,000 roubles, au grand-chancelier Malachowski une de 3,000 roubles, au Vice-Chancelier237-2 un présent de martes zibelines et au chancelier de Lithuanie237-3 l'ordre de Russie; que ledit Chancelier avait marqué d'ailleurs au sieur Gross qu'il était nécessaire qu'il fît encore un rapport en conséquence pour presser là-dessus le ministère russe, ce qui ne pouvait se faire trop souvent, et dans lequel il appuierait principalement, en conséquence des insinuations que le comte de Brühl lui aurait faites, que la cour de Moscou fasse des représentations à celle de Vienne pour s'arranger sur cette affaire, ce que lui, Chancelier, ferait effectuer de la manière la plus efficace.

Au reste, il est constaté que la cour de Saxe sollicite avec une vivacité, comme elle n'a point fait encore, le concours de ses alliés pour former une confédération à la Diète de cette année, et qu'elle n'épargne rien de son côté pour intimider ceux qu'elle ne peut pas gagner des Polonais, et que, quand la Russie ne ferait pas autre chose que ce qu'elle fait, de donner des pensions, ce que peut-être l'Angleterre fera également, tout cela fortifiera le parti anti-républicain et affaiblira le nôtre, qui ne serait soutenu d'aucune façon par les cours qu'il devrait regarder comme le soutien de la patrie. J'ai informé Votre Majesté combien on a insisté auprès de M. de Broglie et de moi sur des déclarations qu'on soutiendrait leur liberté contre les attentats que la cour<238> de Saxe, soutenue par ses alliés, voudrait lui porter, et que les assurances générales que nous avions données, n'étant pas autorisés d'en donner de positives de la part que la France et Votre Majesté prendraient toujours aux intérêts de la République, de rendre compte à nos cours, ont autrefois fait naître une confiance en nous et à eux-mêmes qu'on ne connaissait pas, mais que les plus considérables personnes du bon parti commencent à ne regarder les bonnes paroles dont nous les avons payés, avec quelques milliers de ducats qu'on a distribués à la Diète, que comme tendantes à les séduire pour rompre la Diète, de peur qu'il ne s'y fît quelquechose de contraire à nos intérêts; que, si donc on n'achève pas de donner à notre parti la consistance qui lui manque, et sans laquelle il n'y aura jamais que les semences d'un parti, mais qui deviendront plus rares, à mesure qu'on perdra le temps à les négliger, non seulement on perdra la confiance, mais on avancera peut-être des évènements qu'on éviterait en rendant à ce parti la considération qu'il doit avoir; car plus il sera obligé de travailler par des souterrains, plus il paraîtra faible à la cour de Saxe et plus celle-ci se fortifiera dans l'espérance de réussir par quelque coup de main, comme elle l'a tenté à la Diète de Grodno de l'année passée.

Il est très sûr que Votre Majesté et la France ne doivent pas négliger de faire autant de leur côté que les autres en font, qui est de rassembler les matériaux des principaux personnages pour en construire un parti qui puisse agir selon les desseins et les intérêts qu'il convient de soutenir. Toute la facilité de la réussite est du côté de la bonne cause, puisque nous ne voulons rien faire, mais seulement empêcher que rien ne se fasse contre la liberté de la Pologne.

Il y a longtemps que le comte Mniszech, à qui le ministre Brühl persuade ce qu'il veut, s'est mis en tête d'établir le crédit des Potocki à la cour sur la ruine de celui des Czartoryski, qu'il hait mortellement, et c'est sur ce ton-là que les lettres que le comte Brühl écrit aux palatins de Belcz et de Smolensko seront stylisées. Je ne doute, au reste, pas que les palatins de Belcz et de Smolensko n'aient dit là-dessus des merveilles au sieur Benoît, pour se faire valoir davantage. Tout ce que celui-ci insinue, comme si le comte Brühl trompait son maître en lui faisant accroire que ce soit en faveur de ses enfants qu'on travaille, tandis qu'il serait d'accord sur un tout autre sujet avec les cours de Londres et de Pétersbourg, est suffisamment désavoué par les démarches qui se font à ces cours pour le Prince Électoral, et plus encore par la persuasion dans laquelle doit être la cour de Russie qu'aucun prince ne lui convient mieux sur le trône de Pologne qu'un prince saxon; d'ailleurs, ses intentions pour tel sujet ou un autre sont très indifférentes; il s'agit de quoi avoir à opposer à l'exécution de toutes celles qui sont contraires aux intérêts de Votre Majesté, et c'est de quoi l'on sera sur par les arrangements qui sont à prendre.


Nach der Ausfertigung.

<239>

235-6 Vergl. S. 228.

236-1 Vergl. S. 222.

236-2 Le roi de Prusse.

237-1 Komorowski.

237-2 Wodzicki.

237-3 Graf Michael Sapieha.