6296. AU LORD MARÉCHAL D'ÉCOSSE A PARIS.

Potsdam, 16 avril 1754.

Vous remercierez bien obligeamment de ma part M. de Contest des assurances qu'il m'a fait donner, en conséquence de votre dernier rapport, de ce que la France retiendrait sûrement le maréchal de Löwendahl301-1 et ne permettrait pas qu'il passât au service de quelque autre puissance; article qui me tranquillise extrêmement, par le grand intérêt que j'ai que ledit maréchal ne passe jamais au service de quelqu'un de mes voisins.

Quant à mes nouvelles de Londres, elles me confirment qu'il n'était question pour le moment présent d'aucune affaire étrangère auprès du ministère, et que le duc de Newcastle continuait d'être uniquement occupé à fortifier sa partie et à faire beaucoup d'emplois du second ordre à tous ceux qui pourraient le soutenir; aussi paraissait-il y réussir assez bien; qu'on saurait compter que le ministère ne chercherait à chipoter rien d'importance dans l'étranger, avant qu'il n'eût essayé ses forces et en fait l'expérience dans le Parlement qui s'assemblerait dans le mois de novembre, car pour celui qui serait convoqué dans le mois de juin, il ne durerait pas assez pour les connaître et n'y serait question que des formalités et de donner la consistance requise au nouveau corps.

En attendant, il m'est parvenu un avis fort étrange, et auquel j'ai de la peine d'ajouter foi jusqu'à ce qu'il ne me soit confirmé, mais en conséquence duquel le ministre anglais à la cour de Bavière doit avoir ministérialement demandé à la disposition du Roi son maître les 6,000 hommes que l'Angleterre paie, et que ce corps était destiné pour l'Italie. Je serais bien aise que vous communiquiez cette nouvelle à M. de Contest, en ajoutant cependant que je la lui donnais telle que je l'avais reçue et que je ne lui en saurais point garantir la vérité, mais que j'espérais d'en être plus éclairci au premier jour.

Dites-lui d'ailleurs que je savais par des bonnes lettres de Moscou301-2 que le 19 du mois de mars passé les deux chanceliers de Russie<302> avaient été en conférence avec l'impératrice de Russie, qui avait duré cinq heures de suite; que le jour suivant ces deux chanceliers avaient travaillé ensemble toute la journée; que le 22 dudit mois l'on avait assemblé le Sénat et les membres de tous les collèges présents à Moscou, pour y traiter différents sujets dont mon correspondant ne m'avait, point informé, mais que, durant cette assemblée, l'Impératrice avait fait présent de 50,000 roubles argent comptant au chancelier Bestushew, qui l'en avait remerciée en pleine assemblée, et qu'à la suite l'Impératrice avait signé un ordre pour lever 30,000 recrues dans l'Empire. Que toutes ces circonstances me faisaient juger que l'impératrice de Russie pourra avoir accepté le contre-projet du traité de subsides302-1 que le ministère anglais avait fait présenter par le sieur Guy Dickens.

J'attends ce que vous me marquerez de la réponse que M. de Contest vous fera à ces sujets.

Federic.

Nach dem Concept.



301-1 Vergl. S. 275.

301-2 Bericht des holländischen Gesandten van Swart an die Generalstaaten, Moskau 25. März.

302-1 Vergl. S. 192.