<257> 9 de ce mois1 de ma façon de penser sur les opérations des ministres de France touchant la querelle avec l'Angleterre, ne doutant pas que l'exprès qui a été chargé de vous porter ladite dépêche, ne vous soit déjà arrivé, avant que la présente vous parviendra. Ce que je crois cependant, c'est qu'il ne faut pas douter que l'Angleterre ne tombe dru sur la France et qu'elle ne lui donne bien à démêler encore dans le courant de cette année-ci, de sorte que les évènements justifieront, quand j'ai dit que ce seraient des illusions toutes pures que de croire qu'on rectifierait les Anglais en temporisant avec eux.

Quant à ce que M. de Rouillé vous a dit au sujet de mes démêlés avec les ministres de Suède,2 vous lui direz qu'il n'y avait rien de ma faute, vu que je n'avais pu me dispenser de leur marquer mon indignation sur leur procédé très grossier dans l'affaire de Rexin, contraire à tout que la bienséance exigeait et à la considération que ces ministres devaient aux puissances souveraines, surtout à celles qui sont en alliance avec la Suède; mais qu'au surplus cette affaire ne serait pas de conséquence, et que je ne doutais pas que la France ne l'accommodât aisément par ses bons offices, si elle les veut employer, puisqu'il me suffisait d'avoir appris auxdits ministres d'agir dorénavant plus modérément avec des princes souverains.

Pour ce qui regarde le sieur de Rexin, vous direz à M. de Rouillé, en lui faisant un compliment convenable de ma part sur les instructions favorables qu'il avait bien voulu donner à son sujet au chevalier de Vergennes, que c'était en dernier lieu que j'avais reçu par l'ordinaire de Suède la première et la seule dépêche, à la date du 4 juin, dudit sieur Rexin, qui portait en substance que, par les soins du sieur Celsing, qui lui avait prêté son assistance, on lui avait demandé peu de jours après son arrivée ses lettres de créance pour le Sultan et pour le Grand-Visir, qui avait été alors Ali-Bacha; que ces deux lettres avaient opéré tout l'effet désirable à la Porte, de sorte que, si ce visir n'avait été malheureusement bientôt culbuté,3 sa commission aurait eu tout le succès imaginable. Qu'en attendant ce visir avait fait avant son nouvel exil une idée si favorable au Sultan sur le grand intérêt que la Porte avait pour contracter une alliance avec moi, que, malgré la chute de ce visir, la Porte avait fait remettre à lui, Rexin, deux lettres, l'une du Sultan et l'autre du visir Abdulah-Bacha, par où la Porte marquait beaucoup d'inclination de faire avec moi un traité d'amitié et de commerce. Qu'en attendant lui, Rexin, avait gardé un parfait incognito, de sorte que toute sa négociation avait été traitée par écrit et par l'entremise du sieur Celsing le plus secrètement; mais, comme malgré cela les ministres de Russie, d'Autriche et de l'Angleterre en avaient soupçonné quelque chose et qu'ils s'étaient donné des mouvements extrêmes pour en pénétrer le fond, en quoi ils n'avaient cependant nulle-



1 In der Vorlage verschrieben: 10.

2 Vergl. S. 176—178. 196.

3 Vergl. S. 182.